Vivre avec le Syndrome de Waardenburg, Emilie nous parle de son quotidien.
- Emrick LEANDRE
- 7 avr. 2023
- 7 min de lecture
Emilie est une jeune femme tout à fait comme les autres. Du moins, on pourrait se le dire. Pourtant, la jeune guadeloupéenne a bien une différence. Elle a le syndrome de Waadenburg. Vous ne connaissez pas ? A travers son témoignage, elle nous apprend un peu plus sur cette maladie non bénigne qui fait à la fois son charme et sa différence. Maladie génétique, elle l’a aussi transmise à son fils Kémyann.

Si on vous dit syndrome de Waardenburg, est-ce que cela vous dit-il quelque chose ? Non ? Mais, en général, celles et ceux qui ont cette maladie génétique non bénigne ont des yeux de couleurs différentes (hétérochromie). Autre particularité de ces personnes, elles développement une décoloration accélérée des cheveux avant les trente ans et ont des traits du visage plus étirés que la normale. Pour certains, ils ou elles ont des dépigmentations sur la peau à certains endroits de leur corps. Loin d’être de l’esthétisme, ces personnes sont atteintes d’un syndrome peu commun mais surtout peu connu du grand public. L’autre spécificité, c’est la surdité totale ou partielle. Un syndrome qui fait de ces personnes, des individus uniques en leur genre.
Mais qu’est-ce que le Syndrome de Waardenburg ?
Le syndrome de Waardenburg, du nom de l'ophtalmologiste hollandais l'ayant décrit en 1951, est lié à une anomalie génétique. Il suffit que l'un des deux parents transmette à l'enfant le gène défectueux pour que celui-ci développe la maladie. Il aura lui-même 50 % de risque de le transmettre à chacun de ses enfants. Il affecterait environ 1 personne sur 50 000.
Ainsi, les symptômes les plus courants du syndrome de Waardenburg sont une peau pâle et des yeux pâles. Un autre symptôme courant est une mèche de cheveux blancs près du front.
Dans de nombreux cas, une personne atteinte de cette condition peut avoir deux yeux de couleurs différentes. C’est ce qu’on appelle l’hétérochromie iridienne. Toutefois, l’hétérochromie peut exister sans la présence du syndrome de Waardenburg.
Chez certains nouveau-nés, la condition est évidente à la naissance. Pour d’autres, il peut s’écouler un certain temps avant que les signes ne deviennent suffisamment évidents pour qu’un médecin puisse poser un diagnostic.
De pluss, il se décline en quatre sous-types, dans lesquels des gènes différents sont affectés, et qui possèdent des spécificités propres :
Les types 1 et 2 sont les plus courants, le type 2 se distingue du type 1 par l'absence d'écart entre les angles internes des yeux.
Le type 3, appelé syndrome de Klein-Waardenburg, se singularise, en plus de la présence des troubles habituels de la maladie, par la présence d'anomalies au niveau musculo-squelettique : les patients souffrent de contractures, de problème osseux au niveau du poignet, des mains ou des pieds (accolement des doigts ou des orteils).
Le type 4, appelé syndrome de Waardenburg-Shah, s'accompagne des signes de la maladie de Hirschsprung qui affecte les mouvements de l'intestin et entraîne une constipation chronique.
A savoir que c’est la cause de 1 à 3 % des cas de surdité congénitale. Les gens de toutes les origines et de tous les sexes sont également vulnérables au syndrome de Waardenburg. La maladie peut être héritée et peut aussi se développer spontanément par mutation génétique.
Syndrome de Waardenburg : la prise en charge :
La prise en charge des personnes atteintes par le syndrome de Waardenburg repose sur différentes approches :
En cas de surdité, un appareil auditif ou un implant cochléaire permettront d'améliorer l’ouïe.
Une intervention chirurgicale, à visée esthétique, pour corriger l'écart trop important entre les angles des yeux.
Une protection solaire rigoureuse : ces personnes sont très sensibles rayonnement UV car elles ne produisent pas beaucoup de mélanine, le pigment protecteur de notre peau. Ainsi, il est nécessaire d'appliquer une crème solaire et de porter des vêtements couvrant. Le port de lunettes de soleil est également nécessaire.
Pour mieux comprendre la maladie, nous avons rencontré, Emilie, une jeune guadeloupéenne de 30 ans qui fait partie de ces personnes atteintes du syndrome de Waardenburg. A travers son témoignage, elle nous apprend un peu plus sur cette maladie non bénigne qui fait à la fois son charme et sa différence. Maladie génétique, elle l’a aussi transmise à son fils Kémyann.
The Link Fwi Bonsoir Emilie, soyez la bienvenue sur The Link Fwi, Qui êtes-vous ? Petite présentation.
Emilie : Bonjour à tous, je suis Emilie j’ai 29 ans. Bientôt trente ans.
TLFWI : Si vous êtes aujourd’hui devant nos caméras c’est pour parler de votre spécificité. Le syndrome de Waardenburg. Qu’est-ce que ce syndrome et comment se caractérise t-il chez vous ?
Emilie : Alors, le syndrome de Waardenburg est une maladie génétique qui se traduit par la présence de yeux verrons ou des yeux bleus comme ceux de mon fils ou les miens. Elle se traduit également par une dépigmentation du cuir chevelu, c’est la raison pour laquelle j’ai des cheveux blancs et des traits du visages spécifiques mais aussi une surdité plus ou moins importante en fonction des cas. Me concernant, j’ai le type car, il y a quatre types de syndromes de Waardenburg. Du coup, j’ai les yeux verrons, une surdité à une oreille, des traits sur le visage et une dépigmentation des cheveux dès que j’ai eu dix-huit ans.
The Link Fwi : Quand et comment la maladie a t-elle été détectée, était-ce depuis le ventre de votre mère ou à votre naissance ou encore à l’âge adulte ?
Emilie : Alors là pas dutout. Je l’ai découvert à la naissance de mon fils avant cela je ne savais ce qu’était le syndrome de Waardenburg.
TLFWI : Vous n’aviez jamais constaté votre particularité ?
Emilie : Pour tout vous dire, je pensais que mes yeux de couleurs différentes, mes cheveux qui se dépigmentaient à mes dix-huit, tout ceci était du simple hasard. Je ne connaissais pas la maladie. Je ne m’étais jamais forcément renseigné dessus mais, il est vrai qu’avant, il n’y avait pas tout sur le web. Depuis, les informations se sont développées. C’est à la naissance de mon fils quand il a été diagnostiqué sourd, que j’ai commencé à faire des recherches et à m’informer sur cette maladie.
The Link Fwi : Êtes-vous la seule personne de votre famille à avoir ce syndrome ?
Emilie : Non, nous l’avons tous. C’est à dire, ma mère, mon frère y compris mon fils et moi.

TLFWI : Se développe-t-il de la même façon chez les autres membres de votre famille ?
Emilie : Sachant que le syndrome de Waardenburg est génétique, il se transmet des parents à l’enfant et que lorsque l’on a un type, il est impossible pour la famille “ malade” de développer un autre type du syndrome. Ce qui veut dire que ma famille et moi aurons toujours le type 1. Par contre, chez nous, les symptômes diffèrent d’un membre à l’autre...
The Link Fwi : Justement comment se présente-t-il chez les autres membres de votre famille ?
Emilie : Ma mère a les cheveux blancs et des déformations sur le visage. Mon frère a quant à lui, une partie de son œil qui est bleu ainsi qu’une surdité sur une oreille. Tandis que mon fils a les deux yeux bleus et une surdité totale des deux oreilles.
TLFWI : En début d’interview, vous avez dit que vous ne connaissiez pas cette maladie jusqu’à la naissance de votre fils, comment viviez vous votre différence ? Avez-vous subi des moqueries, étiez-vous la source d’interrogation des autres ?
Emilie : Pour être honnête avec vous, j’ai très mal vécu ma différence durant mon enfance ou mon adolescence. J’avais du mal avec les regards des autres personnes. Les enfants n’étaient pas très gentils avec moi. Cependant, en grandissant, je le vivais mieux. Après comme ma surdité ne se remarque pas, cela ne m’a pas déranger à laquelle. Disons que mes yeux intriguaient. Après, lorsque mes cheveux blancs sont apparus, je ne voulais pas les garder. En même temps, j’étais jeune. Pour m’accepter, on va dire que j’ai un bon caractère et de bons parents qui m’ont toujours aidé à avoir confiance en moi. Ce qui ne m’empêchait pas d’être la cible des moqueries d’autres camarades. Je peux dire que j’ai subi une forme d’harcèlement scolaire durant presque toute ma scolarité.
The Link Fwi : Quelles sont les phrases que l’on pouvait vous dire ?
Emilie : ils disaient que je ressemblais à un alien ( extraterrestre) ou encore que j’étais un animal. On me comparait au chat. D’autres personnes me disaient que je leur faisais peur. Les moqueries étaient perpétuelle. J’étais blessée.

TFLWI : Et aujourd’hui comment est votre quotidien ? Vous pose t-on encore autant de questions ?
Emilie : Les choses ont beaucoup changé. J’ai pris confiance en moi. Le changement s’est opéré alors que j’étais au lycée. Chose étrange, une partie des personnes qui se moquaient de moi, ont commencé à me dire que j’avais de beaux yeux. A ce jour, je peux dire que 95% des remarques ou questions sont positives. Je le vis très bien en tant que femme adulte.
The Link Fwi : Savez-vous combien de personnes vivent avec le syndrome de Waardenburg en Guadeloupe ? Votre famille est-elle la seule en Guadeloupe à avoir ce syndrome ?
Emilie : Je dirais qu’il y a quatre familles connues; après vu qu’il y a plusieurs personnes dans chacune de ces familles, je ne pourrais pas être en mesure le nombre exact.

TLFWI : Pourquoi selon vous, la maladie est-elle méconnue du public ?
Emilie : Selon moi, je trouve qu’elle commence à être connue. De plus en plus d’informations circulent grâce aux réseaux sociaux, à intérieur. Puis, les gens s’arrêtent à mes yeux qu’ils trouvent magnifique. Pour moi, c’est dû au fait que sur les réseaux sociaux comme Instagram, les personnes ayant ces spécificités se font connaître. Après, évidemment, tout le monde ne sait pas qu’au-delà de l’aspect esthétique, c’est une maladie entraînant une surdité.
The Link Fwi : Aujourd’hui, est-ce difficile pour vous de rencontre une autre personne pour faire votre vie et avoir un autre enfant qui puisse avoir le syndrome ?
Emilie : A vraie dire non parce que l’on peut dire que j’ai de l’expérience avec mon fils qui m’a beaucoup apprise. Je ne dis pas qu’il a surmonté son handicap et voir comment il parle malgré sa surdité me réconforte. Néanmoins, c’est beaucoup de travail qui a été mené. Je n’ai pas forcément envie d’avoir d’enfant mais même s’il nait sourd, cela ne va pas forcément me déranger.

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