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Sargasses le grand retour qui sape le moral.

Depuis le début du mois de Février, les Sargasses envahissent nos côtes, au grand désarroi des professionnels de la pêche et du tourisme. De Vieux Habitants à Baillif, de Gosier à Saint-François, on peut les apercevoir arrivant par vagues interminables. Loin de s'arrêter, voici qu'on apprend qu'une masse très importante d’algues sargasses, s’étendant sur 8000 kilomètres et pesant environ 6,1 millions de tonnes, menace de recouvrir les plages de Floride et les îles des Caraïbes « dans les prochains jours ».



Sargasses échouées sur la plage de Port-Louis. Photo : internet

Des paysages luxuriants, des plages de sables fins, des rivières et des cascades toutes plus belles les unes que les autres, autant d'atouts qui placent la Guadeloupe comme la Martinique ainsi que l'ensemble des pays de l'arc antillais parmi les plus grandes destinations touristiques mondiales. Pourtant, depuis moins d'une décennie, environ depuis 2013, ces petits paradis riches en biodiversité vivent sous différentes menaces écologiques. Parmi elles, les sargasses.


Alors que la saison estivale approche à grands pas, et que le secteur du tourisme connait une embellie après ces trois années moroses dû à la pandémie de Coronavirus, voici que les sargasses signent leur grand retour.


Elles envahissent déjà les plages de la Guadeloupe et des communes longtemps épargnées sont désormais touchées. C'est le cas pour la commune de Port-Louis dans le nord Grande-Terre :



Sargasses échouées sur la plage de Port-Louis. Photo : internet

La situation est loin de s'améliorer comme l'annonce le Courrier des Amériques, une masse géante d'algues sargasses se dirige vers la côte Atlantique de Floride et de la Caraïbe. Elle s'étendrait sur 8000 kilomètres et pesant environ 6,1 millions de tonnes. Elle menace de recouvrir les plages de Floride et les îles des Caraïbes dans les prochains jours.


En Guadeloupe, on en attend 200.000 tonnes cette année, au grand dam de Sylvie Gustave Dit Duflo, vice-présidente du Conseil régional en charge de l’environnement : "On a 19 millions de mètres cubes de sargasses sur le bassin caribéen dont 30% s'échouent, mais c'est 30% de trop. Sincèrement, je ne sais pas comment s'en sortira notre population ni comment s'en sortira notre biodiversité."


Face aux arrivées massives des algues brunes, le nouveau préfet de la Guadeloupe, Xavier Lefort, a annoncé de nouveaux moyens financiers pour les communes en difficulté.



Image satellite des sargasses en février 2023 : la plus haute densité d’algues est en rouge. Image : courtoisie de l’University of South Florida Optical Oceanography Laboratory.


Loin d'être un phénomène contemporain, les sargasses étaient déjà connues au XVe siècle, lors de ses expéditions, l'explorateur Christophe Colomb avait pu observer ces masses flottantes. Toutefois, il semblerait que le navigateur Portugais Diogo de Teive aurait atteint la mer des Sargasses vers 1452. Elle fut même mentionnée sous le nom de Mare di Baga, dans une carte marine italienne de l'époque. Au cours des siècles suivants, les marins qui sillonanaient l'Atlantique nord entre le XVe, XVI, XVIIe et XVIIIe siècle craignaient de traverser cette mer qui était une zone de calme plat, sans vent, où il était difficile d'en sortir. Depuis la fin de l'année 2010 début de l'année 2011, l'arc caribéen au sein duquel se trouvent les îles de Guadeloupe et de Martinique est perturbé par l'arrivée d'algues brunes. Au départ irrégulières, avec des échouages tous les deux ou trois ans, on constate que les algues sargasses sont toujours plus nombreuses et toujours plus récurrentes avec désormais des échouages chaque année.


Deux années ont été particulièrement riches en échouages. Il s'agit de 2015 et de 2018. En 2015, la quantité de sargasses explose. Cette année-là, les échouages sont massifs et quotidiens, les populations en colère appellent à l'aide les gouvernements qui, eux se retrouvent déborder par la quantité journalière et donc complètement démunis face à la situation. Trois ans plus tard, soit en 2018, la situation empire. En Guadeloupe et en Martinique les écoles ferment, des abris anti-sargasses sont ouverts pour les populations les plus exposées, les hôtels et les gîtes ferment leurs portes, les liaisons maritimes sont arrêtées. Une situation quasi similaire dans les autres pays de la région.


Quant à leur provenance, le monde scientifique semble être divisé. En effet, pendant longtemps, les hypothèses laissaient penser que ces algues d'apparences inoffensives provenaient du Golfe du Mexique ou de la Mer des Sargasses située dans le nord de la Caraïbe ( proche des Bermudes) et tiendrait de son nom des algues dites Sargassum qui ont la particularité d'y flotter, et de s'y accumuler en surface. Cependant, selon une autre thèse avancée par de nombreux scientifiques, elles proviendraient du Brésil. En 2013, une équipe de scientifiques du Canada menée par Jim Gower a montré qu'une " nouvelle petite mer des sargasses" s'est constituée au large du Brésil. Grâce au suivi satellitaire, les scientifiques du Canada mais aussi ceux de la Guadeloupe ont mis en évidence cette nouvelle zone de développement d'algues brunes.




Selon certains experts, la déforestation en Amazonie serait la cause de cette prolifération soudaine de ces algues auxquels étaient déjà habitués marins et population des pays du continent. Ainsi, il semblerait que les nutriments contenus dans l'eau de l'Amazone et l'Orénoque, deux des plus grands fleuves du Brésil, profiteraient à la croissance de ces algues et favorisaient leur développement. Selon Franck Mazéas de la DEAL "cette petite mer des sargasses" se situe dans une zone où les algues peuvent trouver de quoi se"nourrir". "Ces nutriments proviennent du fleuve Congo (en Afrique), de l'Amazone, des upwellings équatoriaux (remontées d'eaux froides du fond) et des poussières de sables du Sahara riches en fer et Phosphates". Il semblerait que cette petite mer des sargasses se soit créée grâce à des vents d’ouest inhabituellement forts et orientés vers le sud pendant l’hiver 2009-2010. Des algues sargasses auraient donc été transportées grâce aux vents et aux courants de la mer des sargasses dans l’hémisphère nord à l’Atlantique tropical en avril-mai 2011.


Dans leurs études, les scientifiques ont établi l'existence de deux espèces d'algues, les " sargassum natans" et les sargassum fluitants. Toutes deux peuvent croître et se diviser totalement au large, contrairement à d'autres espèces comme " sargassum multicum " qui elle nécessite une fixation dans des eaux de faible profondeur. Cette caractéristique permet donc à ces algues de survivre sur des grandes étendues d'eau et sur de grandes distances avant de venir s'échouer, se décomposer sur les côtes. Résultat, en Guadeloupe comme à la Martinique et même ailleurs dans la région caraïbe, les Etats sont débordés.


Par ailleurs, les conséquences de ces échouages massifs sont à la fois environnementales pour les nombreuses espèces aquatiques ou végétales marines. Il est vrai que les îles d'algues flottantes ont toujours été un abri pour de très nombreuses espèces telles que les tortues, les crabes, les anguilles ou même pour certains poissons. Mais, lorsqu'elles deviennent trop abondantes, elles peuvent devenir un vrai problème pour les écosystèmes marins. Ces amas se transforment donc en piège pour certaines espèces et asphyxier les coraux et la végétation sous-marin au niveau des côtes.


Plusieurs études ont prouvé que les sargasses ont des conséquences sur la santé des populations exposées puisque la dégradation produit de l'hydrogène sulfuré, gaz très toxique dont l'odeur est aujourd'hui bien connue de tous. Il est donc recommandé aux personnes sensibles ( enfants, personnes âgées, asthmatiques etc) d'éviter les zones où les sargasses sont en décomposition, mais difficile de partir quand, on vit depuis des générations près des côtes. Ces échouages ont notamment des conséquences économiques, pour ces Etats de la côte Caraïbe dont l'économie repose essentiellement sur le tourisme, dépensent des sommes folles qui se compte en centaines de millions d'euros ou de dollars. ( en fonction de la devise utilisée par le pays). Un véritable coup financier pour des états insulaires aux économiques fragiles et une dépendance de plus pour la Guadeloupe, la Martinique, les îles du nord vis-à-vis de la France Hexagonale.





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