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On dimanch o komandman : à la découverte du quadrille de la Guadeloupe.

Chaque année pour la fête des grands-mères l'association Akadémiduka et le Mémorial ACTe organisent On dimanch o komandman. De quoi honorer les grands-mères aux rythmes du quadrille, pan du patrimoine culturel de la Guadeloupe et même plus largement de la Caraïbe. Les îles de Guadeloupe ont chacune apporté une touche spécifique à cette danse de salon de la fin du XVIIIe siècle.



On dimanch o komandman : à la découverte du quadrille de la Guadeloupe. Photo : ELMS Photography

En Guadeloupe, la société matriarcale font des grands-mères le pilier de la structure familiale. Support sur qui l'on s'appuie dès la naissance de l'enfant et dans la perfection de son éducation. La place de la grand-mère est donc capitale pour le bien-être social local. C'est donc la raison pour laquelle, la fête des grands-mères a une résonnance particulière.


Chaque année pour la fête des grands-mères l'association Akadémiduka et le Mémorial ACTe organisent On dimanch o komandman. De quoi honorer les grands-mères aux rythmes du quadrille, pan du patrimoine culturel de la Guadeloupe et même plus largement de la Caraïbe.





Dès que l'on parle de musique de la Guadeloupe, on pense au zouk ou pour les plus connaisseurs, de la biguine ou du fait de l'influence caribéenne, du kompas en provenance d'Haïti. Pourtant, le quadrille figure parmi les musiques traditionnelles de nos îles. Les îles de Guadeloupe ont surtout chacune apporté une touche spécifique à cette danse de salon de la fin du XVIIIe siècle.


Le quadrille est directement issu de la contredanse française telle qu’elle était dansée au xviiie siècle. Après l’abolition de l’esclavage les maîtres avaient interdit la reproduction de leur danse par les anciens esclaves de peur qu’elle ne soit parodiée. Elle restait toujours pratiquée dans les milieux bourgeois, des communes à proximité des usines, par des rythmes européens.


Ce n’est que vers les années 1930, à la découverte de la biguine que les guadeloupéens de la commune de Sainte Anne, lieudit : Deshauteurs ont constitués le quadrille au commandement sur la base des quadrilles à la Française. Au plan musical le nom des figures restera les mêmes.


Un commandeur donnera le départ de la danse, les mouvements à exécuter à chaque reprise de cette musique syncopée constituant la figure et la fin de la danse.


On dimanch o komandman : à la découverte du quadrille de la Guadeloupe. Photo : ELMS Photography



Cependant, comme l'explique Lameca, bibliothèque Caraïbe : Possession française depuis 1635, la Guadeloupe est avec la Martinique plus au sud, un des territoires caribéens où la tradition du quadrille est des plus vivaces. Cinq quadrilles y sont dansés aujourd'hui, mais quatre sont des créations locales.


Les quadrilles guadeloupéens proprement-dits sont tous constitués de quatre figures appelées pantalon, été, poule et pastourelle suivies d'une finale qui varie selon les lieux. Dans les bals de Grande-Terre, la danse finale tend à être un second été ou, autrefois, une boulangère. À Marie-Galante et dans les fêtes de la Côte sous-le-vent, la finale peut être une biguine ou tout autre danse qui plaît aux danseurs. Le quadrille de Vieux-Fort se termine le plus souvent par une saint-simonienne, une danse qui pour les porteurs de tradition serait un antécédent de la biguine.


La Médiathèque Caraïbe poursuit que le nom des figures et les parcours-type des quadrilles guadeloupéens sont caractéristiques de la danse à la française.


Ces quadrilles se sont développés et maintenus chacun dans une région particulière : dans la petite ville côtière de Vieux-Fort sur la Basse-Terre, le long de la Côte sous-le-vent également en Basse-Terre, dans l'intérieur de la Grande-Terre et sur l'île de Marie-Galante. Chorégraphiés pour deux couples, les quadrilles de Vieux-Fort et de la Côte sous-le-vent sont dansés sans commandement. À Vieux-Fort, ces quatre danseurs sont disposés comme suit : un cavalier avec une dame à sa droite se tient face à une autre dame à la gauche de laquelle se trouve le second cavalier. Quand il y a un bal de quadrilles dans la tradition de Vieux-Fort, les danseurs se disposent ainsi en autant de petits quadrilles qu'il peut s'en former avec les danseurs présents.




On dimanch o komandman : à la découverte du quadrille de la Guadeloupe. Photo : ELMS Photography


Dans sa description du quadrille, Lameca parle du quadrille de la Côte sous-le-vent qui est lui aussi chorégraphié pour deux couples disposés exactement de la même façon qu'à Vieux-Fort. Toutefois, l'usage veut que les danseurs de la Côte sous-le-vent placent deux petits quadrilles côte-à-côte. Autrement-dit, huit danseurs se mettent sur deux lignes comptant chacune deux hommes et deux femmes. Chaque cavalier se tient à côté de sa dame et fait face à une autre dame. Cette disposition en deux quadrilles côte-à-côte fait évoluer huit danseurs en même temps, mais tous les déplacements se font en parallèle dans les deux petits quadrilles simultanément.


Malgré les différences notables qui distinguent les quadrilles de Guadeloupe les uns des autres, certains éléments chorégraphiques se retrouvent parfois d'un quadrille à l'autre dans les figures de même nom.



On dimanch o komandman : à la découverte du quadrille de la Guadeloupe. Photo : ELMS Photography


Pour ce qui est de la musique, l'accompagnement se fera avec des instruments fabriqués sur place, tel ; le siac, le triangle, le tambour de basse, le chacha, l’accordéon, la guitare étaient importés. En ce qui concerne le rythme, c'est généralement un rythme ternaire qui distingue la poule. Les autres figures sont toujours en binaire à deux ou quatre temps.


Lameca va plus loin et donne des détails sur le rôle de chaque instrument qui compose l'orchestre quadrille. Ainsi, des enregistrements effectués au début des années 1970 montrent qu'à travers la Guadeloupe, les mélodies de quadrilles étaient exécutées au violon aussi bien qu'à la flûte, à la mandoline ou encore à la guitare. Depuis la fin du vingtième siècle, tous ces instruments ont disparu et ont été remplacés par l'accordéon. Au milieu des années 2010, des efforts ont été entrepris pour réintroduire le violon dans l'orchestre de quadrille, notamment à Vieux-Fort où le recours au violon pour interpréter les mélodies de quadrille s'est maintenu plus longtemps qu'ailleurs. À l'accordéon qui joue la mélodie, on ajoute quatre ou cinq instruments - des idiophones pour la plupart - pour compléter l'ensemble de quadrille. Ces instruments sont le graj aussi appelé siyak ou mòtòyò (un râcleur en bambou), le chacha (sonnaille), le triangle et le tanboudbass, tous de fabrication artisanale. On leur adjoint de plus en plus souvent une basse électrique et quand le tanboudbass n'est pas disponible une boîte à rythme ou une batterie remplace le tanboudbass, au grand dam de certains porteurs de tradition.



Pour ce qui est de la danse, il y a aussi des différences notables entre les différentes régions de l'archipel guadeloupéen.


Un commandeur dont les rôles diffèrent là encore d'une zone à une autre comme l'explique la Médiathèque Caraïbe " Sur la Grande-Terre, les danseurs sont toujours au nombre de huit, organisés en quatre couples dirigés par un commandeur. À Marie-Galante aussi un commandeur annonce les figures et les parcours, mais si autrefois huit danseurs pouvaient figurer en même temps dans l'espace de danse, ils étaient disposés en deux petits quadrilles distincts, les katos, formés de deux couples chacun. Aujourd'hui à Marie-Galante, les petits quadrilles ou kato se multiplient dans la salle de bal où ils figurent sous le regard attentif du commandeur lançant ses injonctions. "


Autrefois le commandeur jouait d'un petit tambour sur cadre appelé kakòyè sur la Grande-Terre et makè à Marie-Galante. Depuis les années 1970, il ne s'occupe plus que d'annoncer les parcours et les figures car son tambour a disparu de l'orchestre traditionnel.



On dimanch o komandman : à la découverte du quadrille de la Guadeloupe. Photo : ELMS Photography

Le Carême excepté, le quadrille se danse à longueur d'année en Guadeloupe, dans des bals qui rassemblent jusqu'à deux cents danseurs et où de plus en plus souvent les quatre quadrilles sont dansés en alternance.


Moins populaire que le zouk, la biguine ou le bien nommé gwoka, le quadrille a été menacé de disparition car elle était représentée par une petite communauté vieillissante. La transmission était faite en famille. Si vous n’étiez pas de la descendance d’une famille de danseur il vous était difficile de pratiquer cette danse. Pareil, si vous n'aviez pas de proche sachant commandé le bal, il vous était quasi impossible de le devenir. Une transmission était donc nécessaire pour que les nouvelles générations de guadeloupéens puissent se réapproprier ce pan de leur culture patrimoniale. C'est du moins l'objectif de l'Université des Antilles qui s'est associée au Mémorial Acte pour le devoir de préservation s'accomplisse.


C'est ce qu'explique Lorella Rinçon directrice du Mémorial aCTe : " C'est ma deuxième édition que je suis au MActe parce qu'il y a eu la période confinement et de pandémie. Nous avons donc repris l'année dernière bien que cela avait déjà été fait en 2017. La fête des grands-mères est un

rendez-vous qui va devenir régulier. Notre objectif est d'explorer cette affection particulière que nous avons pour elles, et dans ce lien elles transmettre une façon d'être symboliser par la robe madras traditionnelle [...] C'est donc le rôle du Macte que de faire connaître cette belle tradition des costumes et des danses de chez nous que sont la biguine, la mazurka, le gwoka et le quadrille. Nous voulons assurer ce lien transgénérationnel qui est porté par les grands-mères mais aussi en tant qu'institution que nous donnions un espace pour que les gens découvrent. A partir de cette année, il y a un lien qui s'est créé avec l'Université des Antilles au sein de laquelle des étudiants ont appris la première figure. Un lien que nous allons explorer pour que la jeune génération puisse mieux appréhender ce patrimoine. "







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