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Mort de Mikaben au concert de Carimi : une perte pour la musique haïtienne et caribéenne.

Dernière mise à jour : 28 déc. 2022


En plein concert avec le groupe Carimi à Paris, l'artiste haïtien Michael Benjamin a été victime d'un malaise alors qu'il était sur scène. Il est décédé, ce samedi 15 octobre à l'âge de 41 ans. Sa mort laissera un grand vide dans la musique haïtienne et caribéenne créolophone, car, Mika Ben était une légende dans son domaine. Il s'était fait connaître mondialement avec la chanson " Ou Pati" présente sur le mythique album " Haïtian Troubadour " qui avait réuni des artistes de la première République, mais aussi de Guadeloupe et de Martinique et qui avait été un réel succès commercial mondial.



Le chanteur haïtien Michael Benjamin, ou Mikaben, est mort lors d’un concert du groupe Carimi à Bercy, après avoir connu une crise cardiaque (photo d’archive prise lors d’un concert à New York en mai 2019).

Samedi soir à l'Accord Hotel Arena, l'heure était à la fête. En effet, la mythique salle de concert parisienne, anciennement nommée : Paris Bercy, jadis la plus grande de France, figurant même parmi les plus grandes salles de spectacles d'Europe, accueillait l'un des plus gros événements musicaux de la Capitale en cette moitié du mois d'Octobre. Un concert événement que beaucoup de médias locaux, nationaux et Haïtiens parlaient dans leurs éditions : le concert de réunion du groupe Carimi. Pour les aficionados de musique caribéenne cette date unique et exceptionnelle du groupe Haïtien a été l'occasion de revoir sur scène l'un des plus grands groupes de musique kompas de ces vingt dernières années. Il faut dire que, durant sa période d'activité, Carimi a sorti cinq albums plus trois albums live qui se sont écoulés à des millions d'exemplaires avec chacun des tubes sur lesquels nous avons tous dansé.


De la Caraïbe aux Etats-Unis. Du Canada anglophone au Québec en passant par la France Hexagonale, l'Afrique francophone, les pays francophones du Pacifique. Sans oublier certains pays d'Amériques du Sud, c'est quasi l'ensemble de la planète qui a chanté les titres " Kidnapping", " Bang Bang ", " Sensible à la gachette", "Are U Ready?", " I wanna be " interprété par la bande à Mickael Guirand, Richard Cavé et Carlo Vieux. Il y a six ans, fort de leur succès, la troupe musicale haïtienne s'est malheureusement séparée. Une séparation qui avait laissé de nombreux fans de konpa direct orphelins sans ces maestri de la musique d'Haïti.

Puis, les rumeurs disaient que Carimi allait revenir. Les plus sceptiques niaient ce fait. Il faut dire que depuis, Mickael Guirand et Richard Cavé ont monté chacun un groupe flirtent tous les deux avec le succès de leurs nouveaux groupes de konpa, Vayb et Kai. Pourtant, en début d'année 2022, la rumeur a laissé place à l'affirmation. Carimi allait revenir pour une seule soirée. Un concert pour célébrer les vingt ans du groupe. Une annonce qui a visiblement satisfaite tous les fanatiques de konpa et de musique caribéenne. La salle de l'Accord Arena était complète. Plus de tickets disponibles.


Samedi soir, tout était bien. Tout était parfait pour ce rendez-vous exceptionnel qui avait déjoué toutes les rumeurs propagées par les sceptiques qui ne croyaient pas au retour de Carimi. Il y a quelques jours Mickael Guirand avait dit son émotion d’honorer cette date unique à Paris.


" Carimi, c’est le projet de trois amis fait avec beaucoup de cœur. On a fait beaucoup de sacrifices. Nos liens étaient vraiment solides. La séparation, ça a été dur, pour chacun d’entre nous. Avoir l’opportunité de revivre, un tel moment, c’est vraiment extraordinaire. Ça fait revenir tout un tas d’émotion, d’être aussi attendu par les fans, d’avoir leur amour »


Ainsi, pour cette grande fête de la musique haïtienne et caribéenne, le public avait répondu présent. Ce sont bien plus que dix mille spectateurs qui se sont massés à l'intérieur de l'enceinte multisport parisienne. Pour ce grand moment d'ontologie pour la musique haïtienne et plus largement caribéenne, plusieurs artistes d'Haïti, de Martinique, de Guadeloupe étaient de la partie. Du beau monde prêt à enflammer la scène de l'Accord Arena pour le plus grand plaisir du public.



Mikaben à droite et Mickael Guirand à gauche. Photo : réseaux sociaux


Cependant, la fête a tourné court. Elle a même viré au drame. Mikaben, invité à chanter par Carimi, venait d’interpréter son tube « Ou Pati » devant plus de 10 000 personnes, lorsqu’il a fait un malaise en sortant de scène.




Plusieurs vidéos postées sur les réseaux sociaux montraient un Michael Benjamin plutôt fatigué, titubant et peinant à monter sur scène. Malgré ces problèmes de santé apparent, le chanteur a tenu à assurer sa prestation avec le groupe de ses amis.









Le concert a pris fin quand Mickael Guirand est venu annoncer que le public devait évacuer la salle. « C’est très compliqué », a-t-il dit. « On a besoin de prières », pour Mikaben. Une heure plus tard, en dépit de toutes les tentatives, le décès de Michael Benjamin était prononcé.


L'annonce de son décès a sitôt a fait réagir jusqu' au plus haut sommet de l'Etat Haïtien, où l'actuel premier ministre Ariel Henri encore en exercice a tweeté " Je suis bouleversé par la nouvelle de la mort subite du jeune et très talentueux artiste Michael Benjamin « Mikaben ». C'est une grande référence de la musique haïtienne qui vient de s'éteindre».




Parmi les milliers de témoins de la scène dramatique se trouvait, l'ancienne miss Guadeloupe et Première dauphine Miss France, aujourd'hui mannequin professionnelle a assisté à toute la scène. La jeune femme n'avait pas passé la meilleure journée de sa vie. Bloquée sans clé ni téléphone hors de chez elle après avoir accidentellement claqué la porte, Ophély Mezino a dû appeler un serrurier. La facture l'ayant mise en colère, elle pouvait alors compter sur le réconfort qui l'attendait le soir-même : le concert de Carimi avec Mikaben.


La reine de beauté ne s'attendait alors pas à ce qui allait se jouer sous ses yeux : "Tellement choquant de vivre ça en direct, dur de réaliser ce qui s'est passé devant nos yeux. Il est parti avec le drapeau d'Haïti autour de lui, a dit au revoir à sa communauté" déclarait-elle dans sa story Instagram. Cet incident lui a d'ailleurs permis de relativiser : "Je me plaignais quelques heures avant de ce qui c'était passé. Pour une porte ! Une porte ! Une serrure quoi ! Alors cette facture, elle fait mal de ouf. Mais y'a pire dans la vie. Tout peut s'arrêter en un instant."



Vingt ans de carrière riche en tubes :


Comme l'a souligné le chef d'Etat de la République Haïtienne, sa mort laisse déjà un grand vide dans la musique haïtienne et caribéenne créolophone. Mika Ben était tout simplement une légende dans son domaine.


Fils de Lionel Benjamin, légende vivante de la musique Haïtienne dont la longue carrière a commencé en 1970, avec des collaborations avec les plus grands groupes de la scène musicale haïtienne parmi lesquels Les frères Dejean. Néanmoins, le nom de Lionel Benjamin est associé aux chansons de noël. Incarnant la figure la plus emblématique de la chanson de noël haïtienne au point d’être surnommé le « Père Noël haïtien », avec une trentaine de compositions à son actif.


Né en 1981, Mika Ben suivait les traces de son père. Génie de la musique, il s'est révélé au grand public à partir d'un concours de Noël. Musicien pluridisciplinaire, Mika Ben était un touche à tout, savant joué du : piano, guitare, basse, tambours. Toutefois, c'est sa voix qui a fait son succès planétaire.


Dans son interview pour Le Nouvelliste, quotidien national d'Haïti, datée de 2020, Michael Benjamin revenait sur sa riche expérience musicale et se son "héritage " musical.


« Enfant, je n’ai pas eu à penser à faire de la musique. Celle-ci m’a rejoint automatiquement, grâce à mon père, qui m’a beaucoup influencé. De fait, des trois enfants de la famille, j’étais le plus curieux quand il s’agissait de musique, sans toutefois penser à une carrière. Jusqu’à mes 16 ans, où j’ai composé ‘’Forever mine’’, qui figure sur mon premier album. Encouragé par ma famille, qui était très étonnée à l’époque, s’en sont suivies ‘’Ou pati’’ et ‘’Nwèl tristès’’. C’est à partir de ce moment, que j’ai finalement saisi que j’avais bien le talent et que je devais continuer à l’explorer. C’est à partir de cet instant que j'ai commencé à me projeter vers l’avenir. Je me voyais déjà dans 10 ou 20 ans dans la peau d’une superstar »..


De plus, le jeune chanteur avait de très nombreuses collaborations au compteur. Il a fondé le groupe Krézi Mizik. Le succès viendra avec ses nombreuses apparitions sur les albums de Carimi avec « Buzz » ou « Baby » en 2009 et « I miss you » en 2013. Par ailleurs, il a obtenu la reconnaissance internationale avec la chanson " Ou Pati" présente sur le mythique album " Haïtian Troubadour " qui avait réuni des artistes de la première République, mais aussi de Guadeloupe et de Martinique et qui avait été un réel succès commercial mondial.


A ce sujet, il est là aussi revenu sur le succès planétaire de son titre " Ou pati " et l'ensemble de sa carrière : « Mon expérience avec Haïti Twoubadou m’a marqué énormément. Elle a représenté une grande étape de ma vie et de ma carrière. C’était un honneur pour moi d’évoluer au milieu de tous ces géants de la musique haïtienne. J’étais le plus jeune et ma chanson ‘’Ou pati’’ figurait parmi les plus populaires de l’équipe. Avec Haïti Twoubadou, on a réalisé de grands concerts. On a joué devant 25 000 spectateurs au stade d’Honneur de Dillon en Martinique et des dizaines de milliers à Miami. Ça reste l’une de mes plus grandes expériences »,


L'artiste haïtien était littéralement une machine à produire des albums et des hits, fort de quatre albums solos : Vwayaj », « Mika », « Atis lokal p ap janm lague » et « MKBN » ; et d’un opus : « Ayiti san manti » avec son ancienne formation musicale ‘’Krezi Mizik’’. Sans compter des œuvres travaillées pour d’autres artistes, des featurings et des singles à la pelle. « Je pense avoir déjà composé plus d’une cent cinquantaine de morceaux. En 20 ans, j’ai pu faire de grandes réalisations. C’est un bilan très positif. J’ai accumulé un nombre important de fans. Des vies ont été changées grâce à ma musique. J’ai indirectement montré la voie à d’autres jeunes qui ont souhaité débuter une carrière solo. Je suis l’unique artiste haïtien à évoluer dans le top niveau et dans tous les registres ».


Le chanteur a eu une longue carrière musicale des plus riches faite également de déconvenues, comme il l'expliquait dans l'interview avec Le Nouvelliste :

« Avec Krezi, j’étais aux commandes puisque c’est David et moi qui avions formé le groupe. J’ai écrit et produit la majorité des chansons. J’avais une plateforme où je pouvais partager de l’énergie avec mon public et m’imposer en tant que chanteur. J’ai connu trois belles années avec ce groupe au sein duquel, j’ai beaucoup appris. Par ailleurs, j’ai aussi renforcé les rangs de Carimi avec qui je me suis produit dans de grandes salles comme Zenith et Olympia[...] Warner France m’avait approché pour un contrat relatif à ‘’Ti pa m nan’’. Au début, j’étais hyper content et excité. Je m’envisageais déjà avec une couverture internationale. Deux mois après avoir signé, j’ai compris que j’ai été dupé. C’était un moment vraiment difficile ».


Des hommages qui affluent aux quatre coins du monde :


L'annonce de la mort de Mika Ben a fait réagir la communauté musicale haïtienne, caribéenne et antillaise-francophone. A commencé par ses acolytes de Carimi témoins de son départ :








Le célèbre chanteur haïtien Wyclef Jean a également rendu hommage à son compatriote et confrère sur Twitter. «Reposes en paix Roi Mikaben, parti trop tôt».





Sur Instagram, l’artiste guadeloupéen Admiral T a posté une photo du défunt artiste.




La chanteuse Guyanaise Tina Ly était dans les coulisses et devait chanter juste après Mikaben, s'est exprimée sur ses réseaux sociaux pour se souvenir de l'artiste talentueux qu'était Mikaben :




La chanteuse jamaïcaine Spice a également rendu hommage à Mikaben lors de sa prestation au Caribbean Culture Festival.



Le chanteur de la Martinique, Esy Kennenga, a lui aussi tenu à rendre hommage à l'homme et à l'artiste prodige qu'était Mika Ben, avec qui, il avait chanté sur un titre et même partagé une scène live.






Le chanteur et ancien président de la République d'Haïti, Jean-Michel Martely connu sous le pseudonyme de Sweet Micky a lui aussi rendu hommage à l'artiste qui a rendu la nation haïtienne fière.




Les membres du mythique groupe T-Vice, l'autre pilier du konpa contemporain se sont également exprimés sur la mort de leur ami de la musique. Ils ont même annulé les prestations qu'ils devaient assurer :










La chanteuse Rutshelle Guillaume a elle aussi rendu hommage à son mentor, celui a écrit l'un de ses titres :




Le journaliste, rédacteur en chef du quotidien Le Nouvelliste et directeur de publication de Ticket Magazine s'est exprimé dès les premières minutes évoquant le décès de l'artiste. « Ce concert des retrouvailles de Carimi à Paris "se présentait comme le grand moment de l'année et même de l'histoire de la musique haïtienne", a souligné Frantz Duval, rédacteur en chef du quotidien Le Nouvelliste et directeur de publication de Ticket Magazine. En mourant sur scène, Michael Benjamin "rentre dans l'Histoire. Mika a tout donné à la musique"». a-t-il ajouté.


« Une jeune étoile s’est éteinte devant nos yeux ébahis, nous laissant dans la tristesse. Tu portais ta mère patrie dans ton cœur. Tu as chanté Haïti, tu l’as fait connaitre partout jusqu’à ton dernier souffle. Sympathies à ta famille, à tes amis et fans. Bonne traversée cher Mika ! », écrit l’ancienne Première dame de la République d’Haïti, Martine Moïse, sur son compte twitter.



Michael Benjamin décède et laisse derrière lui une femme enceinte et deux enfants. Son futur bébé ne connaîtra donc jamais son papa. Effondrée, Vanessa a prié ses proches de ne pas l'appeler, étant dans l'incapacité de gérer son deuil, sa grossesse et ses deux premiers enfants Gabriel et Leïa : "Je ne suis pas du tout en état de parler. Je viens de perdre mon autre moitié et je n'ai plus les mots."




Vanessa Benjamin désormais veuve utilise les réseaux sociaux pour exprimer sa tristesse et sa détresse.




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