Médaillé de bronze aux Jeux Paralympiques de Tokyo, champion du monde et d’Europe de judo, athlète hors pair, Hélios Latchoumanaya fait briller les couleurs tricolores aux quatre coins du Monde. Le jeune sportif né à Tarbes d’origine guadeloupéenne est une valeur montante du sport national et plus largement du judo français. De passage en Guadeloupe pour la toute première fois, il a accepté de répondre à nos questions.
Médaillé de bronze aux Jeux Paralympiques de Tokyo, champion du monde et d’Europe de judo, athlète hors pair, Hélios Latchoumanaya fait briller les couleurs tricolores aux quatre coins du Monde. Le jeune pensionnaire de l’INSEP, né à Tarbes dont le père est Guadeloupéen, est une valeur montante du sport national et plus largement du judo français. De passage en Guadeloupe pour la toute première fois, il a accepté de répondre à nos questions.
The Link Fwi : Bonjour Hélios Latchoumanaya, bienvenu sur The Link Fwi, vous êtes en ce moment en Guadeloupe, pour des vacances, justement comment se passent ces vacances et que représente la Guadeloupe pour vous ?
Hélios : Alors premièrement merci de me permettre de m’exprimer sur votre média. Pour répondre à votre question, tout d’abord, la Guadeloupe représente beaucoup pour moi, car, c’est avant tout, la terre d’où vient ma famille paternelle. Mon père y est né. C’est donc ici, que puise mes racines familiales. Je suis donc originaire d’ici. Cependant, c’est la première fois que je viens. J’ai toujours eu envie de venir découvrir cette île. J’aurais bien aimé me rendre plutôt mais avec les compétitions cela m’était impossible (rires). J’ai passé quasiment dix jours en Guadeloupe. J’ai visité des sites incroyables, j’ai découvert des paysages magnifiques, je me suis régalé avec des plats excellents. Ces dix jours ont été un pur bonheur.
TLFWI : On sait que vous êtes un sportif de haut niveau. Vous représentez le judo français aux quatre coins du Monde, mais, avant tout pour nos lecteurs et lectrices qui ne vous connaissent pas ? Pouvez-vous, vous présenter ?
Hélios Latchoumanaya : Je suis un jeune de vingt-deux ans comme il y en a partout. (rires) Je fais du sport, c’est vrai que mon palmarès est extraordinaire mais en parallèle de ma vie sportive, je fais des études de journalisme où je me spécialise en radio mais sinon, j’ai une vie banale (rires)
The Link Fwi : Quand avez-vous commencé le judo et avant cela, avez-vous fait d’autres sports ou uniquement que du judo ?
Hélios Latchoumanaya : Non, avant le judo, j’ai fait du football, mais au final, cela ne m’a pas forcément plu. Sans doute que je n’étais pas si fort que ça (rires). Du coup, j’ai commencé le judo mais, il faut savoir que de mes sept ans à mes quatorze ans, j’ai toujours gardé un autre sport à côté de la pratique du judo. J’ai donc fait du BMX, du basket-ball, de l’athlétisme. C’est lorsque j’ai eu quatorze ans, je me suis concentré sur le judo. J’ai été en Pôle Espoir. Il fallait que je fasse un choix A savoir, soit rester à Tarbes, ville où je suis né et je continuais à à faire différents sports soit je me consacrais qu’au judo, je m’entrainais tous les jours pour progresser. J’ai tenté ma chance, je me suis mis à fond sur le judo tout en espérant percer dans ce domaine.
TLFWI : Vous qui avez fait différents sports, quel fût le déclic pour vous, de vous consacrer qu'au judo ?
Hélios Latchoumanaya : A cette période, on m’avait dit de venir m’installer à Toulouse pour ne faire que du judo avec un agenda aménagé entre les études, les entrainements et les compétitions. J’ai été d’accord et comme à mes yeux, le judo était le sport qui m’a le plus convenu, j’ai foncé tête baissée et je me suis lancé dans l’aventure, comme on dit.
The Link Fwi : Quel est votre parcours dans ce sport ? Quelles sont les compétitions auxquelles avez participé et que vous avez remportées ?
Hélios Latchoumanaya : Quand tu débutes, tu commences toujours par les compétitions départementales puis tu passes en régionales. Ensuite, tu progresses en inter-régionales, jusqu’en minime. Me concernant, la progression a été assez rapide. En départementales, j’ai été le meilleur, en régionales pareil. Les choses sont devenues plus dures lors des compétitions inter-régionales mais j’arrivais quand même à accrocher des podiums. A partir des cadets, là, tu accèdes au niveau national. Je n’ai jamais brillé en championnat de France dans la catégorie valide, je ne sais pas pourquoi, mon meilleur résultat a été 7e du classement. Après, je suppose qu’il y a eu le stress et tout, raison pour laquelle, je me faisais battre par les autres compétiteurs. J’ai donc fait plusieurs tournois, notamment le championnat de France. Par la suite, j’ai intégré l’équipe de France parajudo. J’ai pu découvrir le niveau international en participant à des championnats d’Europe ou des mondiaux. 2021, j’ai pu participer à mes tous mes premiers jeux paralympiques à Tokyo, au Japon. Je garde un très bon souvenir de ces olympiades...
TLFWI : Il est vrai que vous avez fait une bonne compétition, vous vous êtes hissé sur le podium.
Hélios Latchoumanaya : Pour les Jeux Paralympiques de Tokyo, j’ai fini 3e du classement. 2022 a été une excellente année pour moi, car, c’est l’année où j’ai remporté le Championnat d’Europe et Champion du Monde en Para-judo. Pour autant, j’ai fait aussi de bons résultats avec les valides. J’ai fait troisième en championnat de France 2e Division mais je n’ai pas pu défendre mes chances en montant en 1ère Division (toujours chez les valides) car je participais au Mondiaux de Para-judo.
The Link Fwi : C’est vrai que depuis le début de l’interview, vous parlez de Para-judo, donc il s’agit de la catégorie réservée aux sportifs dits en situation d’handicap. Lorsque l’on vous voit, nul ne penserait que vous êtes atteint d’un handicap. Justement pouvez-vous nous en parler ?
Hélios Latchoumanaya : C’est vrai que j’ai un handicap invisible et j’ai aussi oublié de le mentionner lors de ma présentation en début d’interview. En fait, je suis déficient visuel. J’ai une rétinite pigmentaire qui est une maladie rétinienne dégénérative qui se caractérise donc par une perte progressive de la vision. En gros, pour faire simple, vous voyez le champ visuel ? Il est semblable à un “gruyère”. Ce qui veut dire que par exemple quand je vous regarde et que je fixe votre œil, je ne vois quasiment rien. D’autre part, dès que vient l’obscurité, la nuit ou la pénombre ou tout simplement une baisse de luminosité, je n’y vois plus rien.
TLFWI : Justement, quelles sont les différences entre le Para-judo et le judo “ normal” pratiqué par les personnes valides ? Est-ce que les règles diffèrent ? Il y a-t-il les mêmes techniques ?
Hélios Latchoumanaya : Non, il n’y a rien qui diffère. Ce sont les mêmes techniques, les mêmes règles, les mêmes gestes. La seule différence et là encore, elle est légère, c’est au niveau de l’arbitrage. En judo valide, les deux adversaires placés sur le tatami vont aller se chercher. Il y a beaucoup de Kumi kata, des jeux de garde. Tandis que nous, en Para-judo, nous posons nos mains sur l’adversaire, avec une main sur la clavicule et l’autre à la manche au niveau du coude et à partir de là, le combat commence. Au-delà de ça, c’est du judo de tout à fait classique.
The Link Fwi : Comment expliquez-vous que l’on ne mette pas plus en avant les sportifs atteints d’handicap ?
Hélios Latchoumanaya : Je m’en suis rendu compte lors de ma participation au JO de Tokyo. Cela, vient sans doute des Fédérations sportives nationales qui communiquent peut-être moins sur le sujet. Les médias ont aussi leur responsabilité et j’aime à leur dire qu’à Tokyo, nous avions une belle couverture médiatique, bien qu’elle ait été, bien moindre que pour les valides. Là, pour les JO de Paris 2024, ils ont annoncé qu’il y aurait une superbe couverture média et on constate que, de plus en plus de médias en parlent. Ils ne traitent pas uniquement du Para-judo mais de toutes les disciplines paralympiques. Après, j’espère qu’ils ne font pas cela uniquement pour Paris 2024 et qu’une fois l’événement passé, le sport paralympique est oublié. De plus, toujours à travers les médias, nous les compétiteurs nous avons été marqués par la vision que certains avaient de nous. Ils étaient étonnés de voir que nous étions capables de véritables prouesses sportives. Il y a eu des phrases du genre “ ah oui, c’est extraordinaire, ils arrivent à faire ça alors qu’ils ont un handicap.” Moi, je milite pour que nous ayons cette reconnaissance et ce droit à la différence. Ce n'est pas parce que nous avons un handicap qu’il faut s’étonner et sortir ce genre de phrases. Au quotidien, je m’entraîne à l’INSEP avec les valides et lors des entraînements, il n’y a pas de différences entre moi et les autres sur le tapis. Je trouve que les médias véhiculent trop l’image de pitié. Nos performances ne sont pas tant extraordinaires que ça. Certes, ce n’est pas tout le monde qui peut y arriver mais nos exploits sportifs ne sont le résultat que de nos entraînements qui sont conséquents mais à force de les faire nous réussissons. Je trouve donc que, comme les valides, l‘on devrait être reconnu pour ce que nous faisons et non ce que nous sommes
TLFWI : D’accord. Avez-vous des judokas qui vous ont inspiré à devenir le grand champion que vous êtes en train de devenir ? Est-ce qu’il vous inspire question technique etc ?
Hélios Latchoumanaya : Je ne suis clairement pas le bon exemple pour ça (rires). A vrai dire, j’aime le judo. Du moins, j’aime le pratiquer mais le regarder à la télévision. Si je tombe sur des compétitions de judo, je vais regarder vite fait. Je vais surtout scruter notamment la façon dont combattent mes potentiels adversaires mais personnellement, je ne vais pas faire la démarche de chercher des programmes spécialisés dans le judo. De ce fait, je ne pourrais pas donner des noms de judokas qui m’auraient inspiré. Après, dans la façon dont je fais mon judo, il y a différentes écoles. Je suis pour qu’il y ait une attaque à droite, une attaque à gauche ou derrière. J’essaie d’analyser tout le monde, tout ceux qui ont réussi avant moi et c’est la raison pour laquelle, je dis, que je n’ai pas de judokas favoris. Je m’inspire de tout le monde.
The Link Fwi : Avant chaque compétition, quand tu arrives sur le tatami, à quoi pensez-vous ? Est-ce que vous faites le vide, vous pensez à quelque chose ?
Hélios Latchoumanaya : Alors qu’il y a des gens qui vont s’enfermer dans une bulle, mettre de la musique, moi, je n’y arrive pas. Cette technique me donne encore plus de stress. Pour me concentrer sur le combat, je vais penser à d’autres choses. Je vais m’encourager avec des phrases du genre “ c’est toi le meilleur sur le tapis”. Des phrases banales mais qui font du bien. Une fois que j’arrive sur le tapis, pour moi, l’adversaire en face n’a aucune chance.
TLFWI : En 2017, tu as été vice-champion d’Europe, En 2019, tu es venu vice-champion d’Europe. En 2021, tu as fait 3e aux Jeux paralympiques de Tokyo. Cette année, tu as fait un doublé en obtenant la médaille d’or au championnat d’Europe en Italie, et en devenant Champion du Monde à Bakou en Azerbaïdjan. La question qui me taraude, c’est est-ce que tu as le temps de visiter tous ces pays ou villes ?
Hélios Latchoumanaya : Honnêtement, j’avoue que c’est très rare. (rires) Lors de la pandémie, on arrive dans le pays et la ville où avait lieu la compétition. Nous étions mis en quarantaine avant la compétition et une fois qu’elle était terminée, nous repartions dès le lendemain. Ainsi, la ville de rendez-vous, nous la visitions en bus le temps de faire le trajet entre l’hôtel et la salle où se tenait le championnat. On ne voyait rien de la ville. Avant, la crise sanitaire, nous avions en amont de la compétition des jours de stage dans la ville en question et l’on pouvait rester pour visiter mais c’est une journée. C’est un peu le côté ingrat de la vie de sportif de haut niveau. Nous faisons le tour du monde mais nous n’avons pas le temps de faire de tourisme.
The Link Fwi : Quel est ou quels sont tes meilleurs souvenirs en compétition ?
Hélios Latchoumanaya : Mon meilleur souvenir est et restera les Jeux Paralympiques. Ramener une médaille lors d’une telle compétition est quelque chose d’inimaginable. Sur le coup, je n’ai pas réalisé toutes les retombées (rires). Même si la victoire a été amère vu que je voulais la médaille d’or. D’autre part, en termes de mon meilleur souvenir, je peux aussi évoquer, les championnats du Monde, en novembre 2022. Dès que j’ai vu le tableau des compétitions, c’était deux jours avant l’événement, j’ai constaté que je n’avais que des adversaires qui semblaient plus fort que moi, dès le début de la compétition. En théorie, comme je suis n°1 Mondial, je suis censé avoir un tableau assez“ protégé” avec des combattants accessibles mais cette fois, c’était différent, d’entrée de jeu, ceux qui étaient opposés à moi, avaient du niveau. Il a fallu les battre. Ce n’était pas mon plus beau judo mais je peux dire que j’ai fait mon meilleur judo parce que j’avais quatre combats et sur les quatre, trois auraient pu devenir le Champion du Monde. Je les ai affronté et j’ai gagné.
TLFWI : Tu es actuellement en Guadeloupe pour des vacances, mais une fois qu’elles seront terminées, tu repars en compétition où à l’entrainement ? Quelles sont tes prochaines compétitions ?
Hélios Latchoumanaya : Une fois les vacances terminées, je vais retourner à l’entrainement à la rentrée. Tout le mois de janvier sera consacré aux entrainements car, à la fin du mois, j’ai ma toute première compétition. D’autres compétitions sont à venir. Ma première Coupe du Monde de judo aura lieu en avril prochain et au mois d’aout, nous avons les Championnats d’Europe et les mondiaux. Il faudra être prèt. Il me faudra beaucoup d’entrainements et de la prise de repères sur certaines compétitions qui seront plus tranquilles.
The Link Fwi : D’accord, merci beaucoup Hélios Latchoumanaya d’avoir répondu à nos questions.
Hélios Latchoumanaya : C’est moi qui vous remercie.
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