Haïti : Germine Joly " Yonyon " le chef des 400 Mawozo extradé aux Etats-Unis.
- ELMS
- 4 mai 2022
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 12 mai 2022
Il est à la tête du gang le plus violent d'Haiti, Germine Joly plus connu sous le pseudonyme de " Yonyon " chef des 400 Mawozo a été extradé vers les Etats-Unis. L'homme connu pour son extrême violence a été transporté par avion spécial par la police fédérale américaine (FBI) de Port-au-Prince vers la ville de Washington, qui avait émis un mandat international contre lui à la fin du mois d'avril.

Sur le continent américain, une chose dont on a peur, lorsque l'on s'adonne à des activités criminelles, du genre trafic de stupéfiants en bande organisée ou même des actes violents. Ou quand on est tout simplement à la tête d'un gang réputé pour sa violence, c'est bien l'extradition vers les Etats-Unis. C'est même la hantise des plus puissants chefs de cartel de la drogue que ça soit au Mexique, au Salvador, en Honduras, au Nicaragua, en Colombie. Même les chefs de gangs de la Jamaïque, de Haïti ou de Trinidad préfèrent purger leur peine dans leur pays que de la faire dans une prison de haute sécurité états-uniennes. S'ils sont transférés au pays de l'Oncle Sam, ils savent qu'ils purgeront une peine de prison à vie, sans possibilité de libération. Par ailleurs, contrairement à leurs pays, ils ne bénéficieront d'aucun passe-droit.
Les accords d'extraditions avec les pays d'Amérique latine ont été signés dans les années 1970, au moment de la création de l'autorité de lutte contre la drogue, la DEA (Drug Enforcement administration). Dans le cas du Mexique, des accords d'extraditions ont été signés en 1978, mais les premiers prisonniers extradés ne l'ont été qu'en 1995. Du côté des pays de la Caraïbe, malgré leur proximité avec Washington et leur partenariat avec l'agence anti drogue américaine, ils ont toujours rechigné à envoyer leurs concitoyens purger des peines de prison à perpétuité sans condition de libération. Question de fierté nationale.
Sauf que depuis la fin des années 1990, les extraditions se multiplient. Comme pour les pays latinos, ce changement de position est sans doute lié au fait que les barons de la drogue ont des complices aux plus hauts sommets des Etats. Ils corrompent députés, sénateurs, membres des forces de l'ordre, des avocat, des procureurs voire même des juges. Quand ils n'usent pas de l'argent, comme pour leurs semblables hispanophones, ils utilisent le chantage et la violence. La corruption des fonctionnaires d'Etat faite avec l'argent de la drogue ou des kidnappings est donc chose courante. De plus, même derrière les barreaux, ces criminels d'envergure internationale continuent de gérer leur business et même de commanditer des assassinats ou des enlèvements contre rançon. Bien souvent, ces pays peinent à contenir l'influence des bandes mafieuses.
C'est actuellement le cas en Haïti où depuis plusieurs mois, des bandes armées s'affrontent pour le contrôle de territoires stratégiques dans et autour de la capitale, Port-au-Prince. Une situation qui vire limite à la guerre civile.
En effet, vingt-cinq ans après le retour de la démocratie. Douze ans après le terrible tremblement de terre de 2010, Haïti semble plonger de plus en plus dans le chaos. Pauvreté extrême, violence, kidnapping et guerre des gang sont le lot quotidien des haïtiens. Mais il en va s'en dire que, depuis la mort du président Jovenel Moïse tué par un commando armé, la situation déjà très difficile, est devenue incontrôlable. Les forces de la PNH ( Police Nationale Haïtienne) peinent à endiguer le problème des 162 gangs et leurs 3000 membres actifs. Dans leur guerre de territoire, ils sèment la mort et le chaos. Cela donne à la population un sentiment d'abandon de la part des autorités.
La lutte pour le contrôle des territoires que se font ces gangs politisés et proches de certains partis politique a des accents de guerre civile qui ne dit pas son nom. Longtemps cantonnés dans les zones très défavorisées du bord de mer de Port-au-Prince, les groupes armés ont grandement accru leur emprise à travers la ville et le pays depuis l'automne 2020, multipliant assassinats et enlèvements crapuleux. Ils n'ont pas de peine à recruter massivement parmi les jeunes chômeurs des quartiers défavorisés des villes et communes de la première République noire.
Ces derniers jours, cette guerre civile a pris une tournure très dramatique, car deux gangs violents de la capitale Port-au-Prince s'affrontent depuis le dimanche 24 avril 2022, les " 400 mawozo" qui contrôle la zone Croix-des-Bouquets " et son rival " Chen Mechan " qui contrôle les zones de Croix-des-Missions et Butte Boyer. Selon les journaux haïtiens, les " 400 mawozo" tentent de reprendre le contrôle du territoire de Butte Boyer perdu en 2018 au profit de « Chen Mechan » notamment Butte Boyer. Les populations sont la cible d'attaques barbares tels que des viols, des meurtres et certaines d'entres-elles sont mêmes brûlées vives dans leurs maisons.
Selon le journal Haiti Libre, la zone où les affrontements ont lieu, est hautement stratégique pour les bandes armées car elle permet le contrôle l'accès routier vers la moitié Nord du pays ainsi qu'entre la capitale haïtienne et la République dominicaine. D'autre part, elle est située à quelques centaines de mètres au Nord de l’aéroport international Toussaint Louverture.
Depuis juin 2021, les autorités ont déjà perdu le contrôle du seul accès routier qui relie Port-au-Prince à la moitié sud du pays car, sur l'espace de deux kilomètres, la route nationale est totalement sous la maîtrise de bandes armées.

Germine Joly : chef fondateur des 400 Mawozo extradé vers les Etats-Unis :
C’est la Police nationale d’Haïti qui en fait l’annonce sur les réseaux sociax. Le chef du gang 400 Mawozo, Germine Joly, alias “Yonyon”, a été extradé vers les États-Unis ce mardi 3 mai. Selon la PNH, son extradition à bord d’un avion spécial (FBI) fait suite à une demande d’entraide judiciaire produite par les autorités judiciaires américaines le 22 avril 2022.
Incarcéré depuis 2015 dans la prison de Port-au-Prince, il est poursuivi par les États-Unis pour "importation d'armes de guerre" et "séquestration contre rançons de citoyens américains", précise le communiqué de la police haïtienne.
« Il est poursuivi via un mandat international émis par le tribunal du district des USA pour le District de Columbia pour les chefs d’accusation suivants : Complot et violation de la loi américaine sur la réforme du contrôle des exportations et contrebande à partir des États-Unis; importation d’armes de guerre ; enlèvement suivi de séquestration contre rançon de citoyens américains », précise la note de la police.

Les accusations nord-américaines se basent sur des informations selon lesquelles des armes, AK-47 et AR-15, ont été expédiés au 400 Mawozo par des intermédiaires du gang basés en Floride. En octobre 2021, le 400 Mawozo avait enlevé 17 missionnaires américains.
La PNH a également rappelé que le prévenu est le numéro un de l’organisation criminelle dénommée “400 Mawozo”. Ce gang est impliqué dans plusieurs actes criminels, dont de nombres assassinats, des enlèvements, des vols de véhicules, de nombreuses destructions de biens privés, et des incendies de maisons où des personnes vivantes s'y trouvaient, etc. Cette bande armée avait notamment enlevé 17 missionnaires américains, des religieux français et haïtiens et récemment un attaché agricole de l’ambassade de la République dominicaine en Haïti. Ce dernier a été libéré aujourd'hui mercredi 4 avril 2022.
Selon les informations de la police haïtiennes, le chef de gang était détenu à la prison civile de Port-au-Prince d'où il continuait de diriger le gang 400 Mawozo à l'aide de son téléphone portable et aurait même tenté de négocier la libération d'otages et dans une moindre mesure sa propre liberté.
Selon ces mêmes sources Germine Joly gardait une grande partie de l'argent des rançons collectées pour acheter des armes et corrompre des policiers et des avocats.
Dans la même plainte déposée par le gouvernement des Etats-Unis, un autre individu est cité, mais sans le nommer. Il est décrit comme servant de leader et apparaissant sur "des vidéos postées sur les médias sociaux, il a indiqué son nom et s'est déclaré comme le leader de 400 Mawozo". Cet individu serait "Lanmò Sanjou" n°2 et lui aussi fondateur du 400 Mawozo qui aurait été appréhendé également par la PNH ce mercredi 4 avril 2022.
Selon les rumeurs l'extradition du chef de gang serait liée, à l'actuel guerre de territoire que se livrent les 400 Mawozo et leur rival " Chen Mechan " mais aussi à un possible projet d'évasion de l'accusé. Selon le Miami Herald " Pendant des semaines, des rumeurs ont circulé sur un projet d'évasion de prison impliquant le pénitencier national, et l'on craignait que Joly ne connaisse le même sort qu'Arnel Joseph, un autre chef de gang notoire que le FBI avait pris pour cible. Arnel Joseph a été abattu par la police en février dernier alors qu'il circulait à moto dans la ville de L'Estère après une évasion meurtrière de la prison civile de Croix-des-Bouquets. "
Vidéo de l'arrestation de " Germine Joly aka " Yonyon "
Des opérations coup de poing de la police mais la violence continue :

Depuis son arrivée à la tête de la PNH, en Octobre 2021 suite à la révocation ( démisssion forcée ) de l'ancien directeur général de la Police Nationale Haïtienne. Frantz Elbé qui a été notamment Coordonateur général de la sécurité du Palais National en 2016. Elbé, diplomé de l’Académmie de Police et fait des études de gestion et a participé à une formation au College Interaméricain de Défense, a multiplié les actions coup de poings contre les bandes armées.
En avril 2022, le nouveau directeur général par intérim de la Police Nationale d’Haïti, a lancé l’opération "dénicher bandits et kidnappeurs". Renforcé par un apport de 12 millions de dollars, un don des États-Unis, Frantz Elbe annonce son intention de multiplier les interventions pour traquer les criminels.
Mais malgré les efforts fournis par les forces de l'ordre haïtiennes et l'armée, le chaos continue en Haïti et les morts se comptent par dizaine chaque jour.
source : Le Nouvelliste et PNH :
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