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Emrick LEANDRE

En Haïti, 531 personnes ont été tuées depuis le début de l’année par les gangs.

Haïti plonge de plus en plus dans l'insécurité et la violence des gang. Des bandes armées qui tuent et qui ne font pas quartier. 531 personnes ont été tuées depuis le début de l'année par les gangs. Un décompte établi par les Nations Unies.




Haïti, pays mythique entré dans l’histoire pour avoir été le premier pays noir indépendant suite à une rébellion menée par des esclaves africains. Premier pays à avoir dit non à la “ domination blanche” et à avoir refusé l’injustice raciale. Lumière dans la pénombre de la colonisation, pendant très longtemps Haïti a fait figure d’exemple pour nombres de nations opprimées désireuses de s’émanciper de quelconque domination occidentale. Pourtant, la Première République Noire a payé le prix de sa liberté chèrement acquise aux français, aux britanniques, aux espagnols et aux Etats-Unis. Deux cent dix-huit ans après ce haut fait d’armes, l’ancien pays précurseur de la liberté des peuples noirs esclavagisés n’est plus que l’ombre de lui-même. Depuis la fin du régime autoritaire des Duvaliers père et fils, François et Jean-Claude, la nation haïtienne lutte constamment pour sa survie.


Entre les cyclones destructeurs et les tremblements de terre meurtriers comme celui de 2010 de magnitude 7,0 à 7,3 dont le bilan est de deux cent quatre-vingt mille morts, trois cent mille blessés et 1,3 millions de sans-abris. Depuis cet événement tragique, le pays caribéen peine à se relever. Pire, il s’enfonce dans une crise sociétale sans précédent.


En effet, l’autre grand problème de la première république noire est bien entendu le mal développement. Pourtant le pays regorge de potentiels. A ce jour, le revenu d’un haïtien issu de la classe populaire est estimé à 3$ par jour. Cette pauvreté est accentuée par une économie en berne voire paralysée suivie d’une inflation galopante. Basée sur des données de l’Institut Haïtien de Statistique et d’Informatique ( IHSI) ( Inflation - Haiti Economie ) le taux d’inflation en Haïti est passé de 24,60% en novembre 2021 à 24,70% en décembre 2021. Tandis qu’en juillet 2022, l’inflation est établie à 30,5%. Ce qui a pour conséquences un accroissement des grandes difficultés pour les ménages haïtiens, déjà touchés par la précarité et le chômage endémiques. Disons-le clairement, l’économie haïtienne est en panne.


Autre difficulté rencontrée par les Haïtiens, le prix des carburants. Evalué il y a peu à 250 gourdes soit 2$ le gallon. Un prix astronomique pour un pays dont on connait les difficultés économiques quotidiennes d’une population qui peine à se nourrir correctement. La situation s’est même aggravée puisque le gouvernement a pris la décision de ne plus subventionner le carburant et même de l’augmenter de 128%, le faisant passer à 4$ le gallon. Une décision prise sous conseil du FMI (Fond Monétaire International) mais jugée inacceptable pour la classe populaire haïtienne obligée de recourir au système D. Une image revient souvent, celle de ces stations-services prises d’assaut par ces foules d’haïtiens, à moto, à pied, en voiture à attendre sous le soleil de longues heures que les stations-services n’ouvrent. Une image devenue malheureusement récurrente, signe visible de cette grave crise économique que traverse la nation caribéenne. Résultat, Haïti est régulièrement secouée par des manifestations d’ampleur qui virent souvent à l’émeute durement réprimée par les forces de police de la PNH (Police Nationale Haïtienne).


L’autre calamité d’Haïti est bien évidemment l’instabilité politique. Depuis son indépendance, la République caribéenne a connu de nombreuses tentatives de déstabilisation politique, des coups d’état sanglants ainsi que des renversements de régimes, même les plus démocratiques. Nous pouvons même parler d’un vrai fléau pour son développement. Comme la note sur le site Exemplaire, l’auteur Eric Sauray, avocat et auteur en 2006 de “ Haïti, une démocratie en perdition “ Depuis son indépendance, obtenue en 1804 après plus de dix ans de guerre contre l’armée française, Haïti n’a que rarement connu la sérénité. Dès 1806, le tout premier chef de l’Etat haïtien, l’Empereur Jean-Jacques Dessalines, est assassiné, ouvrant la voie à une guerre civile de treize années.” Les origines de ces troubles politiques sont nombreuses. Elles proviennent soit de l’intérieur même du pays, à savoir, la haute classe bourgeoise mulâtre, blanche ou syro-libanais à la tête d’industrie et de grandes fortunes, soit de l’étranger, notamment, les Etats-Unis qui ne se sont jamais cachés pour intervenir militairement chez leur voisin caribéen. Entre 1915 et 1934, Haïti a même été occupée par l’armée américaine. Une occupation restée dans les mémoires pour sa violence. Plus récemment, en 1991, Jean-Bertrand Aristide, tout premier Président démocratiquement élu dans l’Histoire d’Haïti est renversé par un Coup d’Etat, là aussi, soutenu par le gouvernement des Etats-Unis via la puissante CIA. Encore plus récemment, l’histoire s’est une nouvelle fois écrite dans le sang avec l’assassinat le 7 juillet 2021 du président Jovenel Moïse. A ce stade nul ne peut dire et si un jour on connaîtra le ou les commanditaires et les raisons de ce nouvel attentat contre la jeune démocratie haïtienne.


Le constat est là, la plus longue période de stabilité qu’a connu la république haïtienne est le fait de la dictature des Duvalier, qui ont régné sans partage sur l’ancienne “ Perle des Antilles” de 1957 à 1986 : à sa mort en 1971, le père, François Duvalier, transmet le pouvoir à son fils Jean-Claude, ainsi que le contrôle d’une milice redoutable, les Tontons Macoutes qui ont, le temps de leurs règnes respectifs, terrorisé la population. Un règne là aussi, soutenu par les Etats-Unis, alors engagé dans une lutte d’influence à travers le monde, avec le grand rival soviétique. Certains aiment à dire qu’Haïti est une colonie des Etats-Unis. Une colonie qui ne dit pas son nom.


Entre pauvreté grandissante, économie entravée, instabilité et violence politique, l’autre affliction d’Haïti est bien entendu la violence orchestrée par les gangs qui se disputent le territoire de Port-au-Prince. Le pays francophone des Grandes Antilles connaît depuis environ une décennie une situation d’insécurité grandissante et alarmante.


Vingt-cinq ans après le retour de la démocratie. Douze ans après le terrible tremblement de terre de 2010, Haïti semble plonger de plus en plus dans le chaos. Pauvreté extrême, violence, kidnapping et guerre des gang sont le lot quotidien des Haïtiens. Mais il en va sans dire que, depuis la mort du président Jovenel Moïse tué par un commando armé, la situation déjà très difficile, est devenue incontrôlable. Les forces de la PNH (Police Nationale Haïtienne) peinent à endiguer le problème des 162 gangs et leurs 3000 membres actifs. Deux grosses organisations criminelles se démarquent de leurs rivaux pour leur extrème brutalité, le G9 Fanmi e Alyé dirigé par un ancien policier répondant au nom de Jimmy Cherizier alias Babekyou ( Barbecue) surnom qui lui vient du fait qu’il brule ses victimes alors qu’elles sont encore en vie. L’autre gang, tout aussi violent, c’est le 400 Mawozos qui contrôle la route principale menant de l’aéroport. Dans leur guerre de territoire, ils sèment la mort et le chaos. Cela donne à la population un sentiment d'abandon de la part des autorités.


En effet, la lutte pour le contrôle des territoires que se font ces gangs politisés et proches de certains partis politiques, a des accents de guerre civile qui ne dit pas son nom. Longtemps cantonnés dans les zones très défavorisées du bord de mer de Port-au-Prince, les groupes armés ont grandement accru leur emprise à travers la ville et certains gagnent même l’intérieur du pays depuis l'automne 2020. Multipliant assassinats et enlèvements crapuleux. Ils n'ont pas de peine à recruter massivement parmi les jeunes chômeurs des quartiers défavorisés des villes et communes de la partie francophone d’Hispaniola. La Cellule d’Observation de la criminalité ( COC) du Centre d'Analyse et de Recherche en Droits de l'Homme (CARDH) a recensé depuis janvier 2022, deux cent quatre-vingt-dix enlèvements d'Haïtiens ; 36 étrangers de neuf pays, bien que les estimations seraient de quarante depuis le mois de janvier à ce jour ainsi que 15 enlèvements collectifs.


Face à toute cette violence, ils sont des milliers à fuir leurs habitations pour se réfugier dans des zones de la Capitales encore sécurisées. Des réfugiés dans leurs propres pays.




531 morts depuis le début de l'année selon les Nations Unies.


Des bandes armées qui tuent et qui ne font pas quartier. 531 personnes ont été tuées depuis le début de l'année par les gangs. Un décompte établi par les Nations Unies.


Selon le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) à la date du 15 mars 2023, 531 personnes avaient été tuées, 300 blessées et 277 enlevées dans des violences liées aux gangs. Des faits de violences qui se déroulent principalement dans la capitale.


Toujours selon l'organisme international, rien que pour les deux premières semaines du mois de mars, près de 208 personnes ont été tuées par balle. La plupart ont été victimes de tireurs embusqués tirant sans discernement sur des personnes chez elles ou dans la rue.


Toujours selon, le Haut-Commissariat des Nations Unies, les viols sont l'autre arme utilisée par les gangs pour assoir leur pouvoir sur les populations.


Des faits de violence commis par l'un des gangs les plus violents de la capitale « Baz Gran Grif ».


Questionné par RFI sur la question de la violence, Frantz Duval, rédacteur en chef du quotidien national Le Nouvelliste a souligné que « plus de civils meurent en Haïti qu’en Ukraine », Le grand reporter haïtien est revenu sur ces statistiques « effarantes, catastrophiques » – notant que « certains cas ont sans doute échappé aux radars de l’ONU tant il n’existe pas de service qui s’occupe de recueillir les corps, de collecter les témoignages, d’assister les parents de victimes ». Et le journaliste de conclure : « Les mêmes pays qui font tout pour que la liberté triomphe en Ukraine sont ceux qui laissent mourir Haïti ».


Comme nous vous le disions, toutes ces violences entrainent des déplacements de population. Depuis le début de l'année, 160 000 personnes ont été déplacées. Beaucoup sont forcés de vivre dans des quartiers informels et ont dû survivre avec des moyens limités.


Dans son rapport l'Onu appelle à la nécessité de renforcer la police haïtienne avec l’aide de la communauté internationale, tout en procédant à une « réforme profonde » des systèmes judiciaire et pénal du pays.


Depuis l'assassinat du président Jovenel Moïse, Haïti connait un cercle infernal de violence. Selon les estimations, les gangs contrôleraient 60% du territoire de la capitale, Port-au-Prince.


A l'heure où nous écrivons ces quelques lignes, les attaques de gangs se poursuivent. Selon Haiti Libre, pendant toute la fin de semaine, dans plusieurs quartiers situés dans les hauteurs de Pétion-ville les gangs ont fait régner la terreur et semés la panique dans la population…


Au moins une dizaine de personnes ont été tués et plusieurs autres blessées dans des attaques menées dans la matinée de lundi. Des violences imputées à un autre gang du nom de « kraze Baryè » dirigé par Vitel’homme. De véritables scènes d'horreur où des corps calcinés ont été vus dans une camionnette, d’autres corps sans vie étaient étendus dans la rue baignant dans leur sang. Selon nos confrères, Ces attaques auraient été menées en représailles à la mort la veille de deux informateurs du gang tués par la population.


Des combats qui se poursuivent dans la zone de Fort-Jacques des individus lourdement armés ont attaqué, mitraillé et pillé plusieurs résidences privées et brûlé des voitures...


Le bilan n'est pas précis car pour l'heure il est encore trop dangereux pour les ONG ou services de secours locaux de se rendre sur place.


Le Canada et les USA pour une intervention militaire ?


Pour conclure cet article, nous apprenons que le président des Etats-Unis, Joe Biden est au Canada pour une rencontre bilatérale avec son homologue Justin Trudeau. Au menu, un sujet préoccupant : la crise en Haïti, et les appels à une intervention militaire internationale.


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