De Pawoka à Ti Po Péyi, Rachel Lollia nous dit tout.
- ELMS
- 18 févr. 2022
- 17 min de lecture
Dernière mise à jour : 19 févr. 2022
Loin d’être une novice en matière de création d'entreprise, Rachel Lollia est une véritable serial entrepreneure. En 2016, elle lançait Pawoka, l’application qui a mis au goût jour les plantes traditionnelles. En 2020, la jeune mère de famille a signé son grand retour avec Ti Po Péyi. Elle nous en parle dans cet entretien sans concession.

Loin des clichés de chômage, violence sous fond de trafic et de pauvreté, la Guadeloupe s’impose de plus en plus comme une terre d’entrepreneurs et de créatifs. En effet, malgré un tissu économique fragile, ils sont de plus en plus nombreux à se lancer dans l’entrepreneuriat. Des entrepreneurs, souvent très jeunes, qui cassent les codes en tournant le dos à l’ancien monde; celui du fonctionnariat qui faisait tant rêver les générations précédentes. Ainsi, la jeunesse sort de sa zone de confort, imagine, conceptualise et développe des projets. Inspirés par toutes les choses qu’ils ont pu voir durant leurs études dans l’Hexagone ou ailleurs dans le monde, ils adaptent leurs idées en fonction du terrain et de ses richesses.
Société matriarcale oblige, en Guadeloupe comme dans le reste des Antilles-Guyane, la femme tient un rôle central tant au niveau familial que sociétal. Quand bien même qu’il subsiste des inégalités entre les hommes et les femmes, tant en matière d’éducation, d’insertion professionnelle ou de conditions de vie, les différences entre les deux sexes sont d’amplitude variable. Pourtant, les femmes ont décidé d’investir le paysage économique, et il faudra compter avec elles.
Justement, du côté de cette gente féminine. Là encore, on voit des changements apparaître. Elles sont nombreuses à entreprendre dans des domaines divers et variés. Que ça soit en cosmétique, dans les domaines de la sécurité, gardiennage en passant par les nouvelles technologies, la femme guadeloupéenne désormais connectée, a décidé de prendre son destin en main et faire mentir les chiffres. D’ailleurs, le saviez-vous ? 52% des entreprises créées en Guadeloupe sont détenues par des femmes. Impressionnant, c’est vrai.
Souvent jeunes, parfois mères de famille, diplômées et compétentes, les guadeloupéennes ne tiennent plus le second rôle. Elles sont le nouveau créneau économique de l’archipel. Parmi ces nouvelles actrices socio-économiques, il y a Rachel Lollia.
Loin d’être une novice en la matière, la guadeloupéenne est une véritable serial entrepreneure. En 2016, elle s’est faite connaître médiatiquement avec Pawoka, l’application qui a mis au goût jour les plantes traditionnelles. En 2020, la wonder woman a signé son grand retour avec Ti Po Péyi. Au départ, le projet se déclinait sous forme de livres pour conseiller les jeunes parents qui cherchaient à diversifier la nourriture de leurs enfants. La cheffe d’entreprise s’est entourée de professionnels de l’agro-alimentaire pour proposer aux parents de petits pots de compote ou de purée à haute valeur nutritive.
La grande différence avec ce que l’on peut trouver dans les grandes enseignes; les produits sont toujours frais et de saison. Par ailleurs, les recettes s’appuient sur la disponibilité des denrées offertes par la biodiversité locale. Pour la distribution, l’enseigne mise principalement sur le circuit court avec notamment les livraisons personnalisées sur commande. Par ailleurs, le projet a pu être concrétisé grâce à un crowdfunding auquel ont répondu présents les connectés(ées). Toujours dans cette logique de proximité qui est l’ancrage culturel par excellence, la cheffe d’entreprise et ses collaborateurs ont entamé, une tournée locale des communes dans un food-truck, pour faire connaître au plus grand nombre les Ti Po Péyi.
Le temps d’une pause, Rachel Lollia est revenue sur son parcours et nous parle de son nouveau projet dans cet entretien sans concession.
The Link Fwi : Bonjour Rachel Lollia, soyez bienvenue sur The Link Fwi, premièrement qui êtes-vous, d’où venez-vous, pouvez-vous vous présenter ?
Rachel Lollia : Bonjour, je suis Rachel Lollia, entrepreneure. Mais comment bien me présenter ? En fait, j’aime bien résumer par l’appellation d’entrepreneure car, depuis quelques années, j’ai mené pas mal d’actions qui ont pour objectif de sensibiliser, valoriser la biodiversité tropicale qui m’est très chère. L’objectif est de permettre à tout un chacun de prendre conscience de la valeur et de la chance que nous avons de vivre sur des oasis que sont la Guadeloupe, la Martinique mais surtout l’ensemble de nos territoires d’Outre-mer. Ma mission est de valoriser cette biodiversité, de la promouvoir et de démontrer tout ce qu’elle peut nous apporter comme opportunités tant au niveau du bien-être personnel que professionnel. Je veux donc mettre en avant ses richesses à travers une bioéconomie qui est un modèle qui est bien évidemment basé sur de l’économie ( business etc) tout en prenant en compte de manière synchrone, le respect de l’environnement,
TLFWI : Quel est votre parcours ? Avez-vous toujours été cheffe d’entreprise ?
Rachel Lollia : Mon parcours est assez atypique. J’ai eu un BAC S, option science de la vie car j’ai toujours été intéressé par la vie. D'ailleurs petite anecdote, enfant, l’une de mes émissions préférées se nommait : La vie. Je ne sais pas si vos lecteurs et lectrices s’en souviendront. J’étais une vraie passionnée. Ma mère, m’avait acheté toute la collection. (rires). Du coup, après ce Bac S option SVT, je me suis dirigée vers des études scientifiques de la vie, donc j’ai fait médecine. Puis, je suis passée en biologie, mais axée sur l’origine de la vie, avec tout ce qui concerne les cellules souches, les cellules embryonnaires etc. Ensuite, je suis revenue en Guadeloupe, pour des raisons personnelles, ce qui fait que je n’ai pas pu continuer mes études dans le domaine scientifique. Du coup, j’ai fait une double compétence en information-communication où j’ai obtenu un master en communication, mais comme je n’avais pas envie de choisir entre les deux domaines, j’ai fait un Master spécialisé en ingénierie de la communication scientifique qui me permettait de devenir directrice de communication scientifique, donc tout ce qui tourne autour du monde scientitique, à l’image d’émission comme E=M6, ou La vie (rires) qui sont des supports de vulgarisation qui permettent d’expliquer la science de la façon la plus simple et la rendre plus accessible à tous.
Etudiante, j’étais déjà entrepreneure et j’ai continué dans cette voie. J’ai mis en place différentes structures, j’ai toujours fait des actions qui étaient, au départ, bénévoles. J’ai d’ailleurs créé propre association. Au fur et à mesure, j’ai mis en place différents projets qui m’ont amené vers une démarche plus économique. Il y a eu Pawoka et aujourd’hui Ti Po Péyi.
The Link Fwi : Comment avez-vous franchi le pas de l’entrepreneuriat ?
Rachel Lollia : Comme je l’ai dit, je crois que j’ai toujours été entrepreneure. D’ailleurs, quand je remonte dans le passé, ma toute première fonction d’entrepreneure fut d’être cheffe de classe. Ensuite, je suis devenue déléguée des élèves. Après, j’étais au CVL. J’ai aussi été représentante des élèves sur la partie régionale. J’ai été membre de différentes associations. J’ai toujours eu ce côté entreprenant et ce même dans ma vie, où j'ai toujours pris des initiatives et petit à petit, mes actions ont pris de l’ampleur. Elles ont un impact plus grand, au point où un jour, j’ai pris la décision de lancer mon association. Puis, de mon association, j'ai créé mon agence, et de cette agence, j'ai développé ma première application. Tout n’a été que challenge grandissant, au point qu’aujourd’hui, je mette en place une industrie agroalimentaire.

TLFWI : Et quelle fût la réaction de vos proches lorsque vous avez décidé de vous lancer dans l’entrepreneuriat ?
Rachel Lollial : Je rigole parce que mes proches me connaissent et, ils n’étaient pas étonnés de me voir lancer différents projets tant au niveau associatif qu’entrepreneurial. Ils savent que j’aime beaucoup les challenges. Cependant, quand je leur ai annoncé que j’allais monter une industrie agroalimentaire, mon père en l’occurrence, m’a dit “ Oui, tu en es capable mais, est-ce que tu vas tenir dans le temps. “ Tenir dans le temps où est-ce que j’aurais la patience de tenir le temps que tout se mette en place, car, j’ai un profil “ starter”. Ce qui veut dire que, je mets en place des choses mais une fois que j’ai atteint mon objectif de créer le projet, je passe à autre chose. Du coup, comme le craignait mon père, ça aurait été ça la difficulté, tenir dans le temps. Néanmoins, je pense que j’ai réussi à me surpasser dans le sens où Ti po péyi a déjà deux ans et demi. Le projet agro-alimentaire a un an. C’est un véritable exercice de fond car, je suis dessus tous les jours mais, je l’avoue, j’aimerais passer à autre chose sur certains aspects. D’ailleurs, j’ai hâte de passer à une autre phase de Ti po péyi, même si le projet en lui-même m’intéresse toujours autant.
The Link Fwi : Est-ce difficile d’être entrepreneure et mère de famille ? Comment arrivez-vous à concilier les deux ?
Rachel Lollia : Ah mais, pour ne rien vous cacher, c’est vraiment difficile. Après ce n’est pas impossible. Néanmoins, je ne pense pas que le fait d’être mère soit plus dure. A mon sens, je crois que l’environnement dans lequel on souhaite créer son entreprise doit être pris en compte. C’est à dire, ça demande de l’organisation. Être mère c’est simplement une fonction en plus, mais en soit, quand on a toutes ces fonctions accumulées, l’environnement rentre vraiment en jeux. A savoir, sommes-nous dans un environnement facilitateur ou bien, évoluons-nous dans un champs de mines qui fait que nous avançons lentement et à l’aveugle. Me concernant, j’ai eu énormément de chance. J’ai grandi dans un environnement qui m’a été bénéfique, tant au niveau de mes proches, de mes amis, de ma famille, qui me soutiennent beaucoup. De plus, j’ai une autre chance, ce sont mes enfants qui sont très impliqués dans mon évolution entrepreneuriale. Elles ont été toutes les sources de mon inspiration et elles ont toujours été très impliquées dans l’ensemble de mes projets et donc elles ont toujours été participatives. Je partage donc cette aventure avec elles.
Au-delà de ma famille, il y a aussi ma communauté qui me soutient beaucoup, que ça soit avec Pawoka ou aujourd’hui avec Ti Po Péyi. Toutes mes expériences, je les ai partagées avec elle et ça aide énormément notamment quand on a une communauté qui vous suit depuis le début et qui valide (ou pas) les projets que vous lancez, ce qui permet de développer, d’améliorer. Vous comprenez pourquoi, je dis que l’environnement proche et communautaire ( réseaux sociaux) est important, ça aide beaucoup.
The Link Fwi : Justement, on vous a connu pour votre projet Pawoka, était-ce votre premier projet ? Pouvez-vous nous en parler en quelques mots ?
Rachel Lollia : Pawoka n’a pas été mon premier projet. Par contre, ce fût le projet sur lequel, mon équipe et moi avons le plus communiqué. Je me suis fait connaître avec lui. Pawoka, est un concept axé sur la valorisation des plantes médicinales de la Guadeloupe et même plus loin, de la zone caraïbe. L’objet est de toujours promouvoir la biodiversité mais aussi sensibiliser, protéger et valoriser la biodiversité type plantes médicinales. C’est une ingénierie qui permet à partir de cette ressource végétale de voir qu’elles seraient les perspectives de développement économique pour nos territoires. C’est ce que l’on appelle, les business à impact pour concilier le côté développement économique et celui de l’intégration et protection de l’environnement pour en faire un cercle d’ouverture.
Tout a commencé par une application mobile gratuite, qui va être renouvellée très prochainement. Elle donnait des informations utiles comme, comment utiliser les plantes de chez nous. Il y avait donc un certain nombre de plantes référencées avec les méthodes de culture, les quantités à administrer s'il y a des administrations thérapeuthiques, les bienfaits etc. Ensuite, il y a eu des conférences, des ateliers, des formations. A ce jour, vu le développement de Ti Po Péyi, Pawoka est un peu en stand-by vu que ma collaboratrice et moi sommes mobilisées dessus. Mais, ça reviendra.
TLFWI : 2016 a été l’année de lancement de votre entreprise, Pawoka a donc 6 ans cette année, quel bilan faites-vous ?
Rachel Lollia : Je suis assez satisfaite car à vrai dire, avant, les plantes traditionnelles n’intéressaient que peu de gens, hormis celles qui avaient été bercées dans ces connaissances. Pawoka a donc eu une fonction de vulgarisation et permis une accessibilité des connaissances sur les plantes locales au plus grand nombre. Un peu grâce à cela, des personnes s’y sont intéressées. Aujourd’hui, ma satisfaction est de voir que de plus en plus d’acteurs investissent ce domaine. Au point que même le champs politique s’intéresse à cette filière, en intégrant la pharmacopée. En amont, de nombreuses personnes avaient déjà œuvré à sa démocratisation mais, à mon avis, Pawoka a été un levier supplémentaire pour mettre en avant les actions qui avaient été initiées par le passé et donner un peu plus d’élan pour que ça touche vraiment le plus grand nombre.
The Link Fwi : Qu’est-ce qui vous a le plus animé, déçu ou ne gardez-vous que de bons souvenirs ?
Rachel Lollia : Honnêtement, ma plus grande frustration part du principe que c'était un projet avant-gardiste. Encore aujourd’hui, je pense que l’écosystème n’est pas près, mais ça commence timidement à se transformer. Figurez-vous que, c’est lors d’un voyage à l’île de La Réunion. Quand j’ai expliqué là-bas ce qu’est Pawoka, pour la première fois les gens comprenaient le projet dans son entièreté. En Guadeloupe, il avait un peu dévié. Il était resté au stade de communication alors qu’il allait bien au-delà de cela. C’est donc à La Réunion que Pawoka a été compris dans son intégralité et c’est là que j’ai compris que le territoire n’était pas forcément assez mature pour les objectifs que j’avais. Ce qui m’a poussé à faire un gros travail sur moi en termes de lâché prise et prendre plus de temps pour lui permettre de se développer. Certes plus longtemps que je ne l’espérais mais qu’il se déploie dans son intégralité. Au final, le temps que j’ai pris sur ce premier projet m’a permis de développer tout autre chose, notamment, Ti Po Péyi.

TLFWI : Si aujourd’hui on fait cette interview, c’est parce que vous avez lancé officiellement le Pôle Agro-alimentaire de Ti Po Péyi qui se déclinait avant sous forme de livres ? Pouvez-vous nous en parler ?
Rachel Lollia : Ti Po Péyi a été initié à partir de mon expérience personnelle, avec la naissance de ma deuxième fille. A ce moment-là, je me suis rendue compte que même en connaissant la biodiversité locale, en nourrissant ma fille, il y avait de nombreuses questions qui je me posais. A savoir, par quoi je devais commencer ? Dans quel intérêt ? Quels étaient les équivalents de ce que l’on me recommandait et ce qu'il y avait à ma disposition notamment au niveau des aliments importés, que ça soit au niveau des haricots verts, brocolis. Par déformation professionnelle, j’ai commencé à faire énormément de recherches scientifiques (rires). Je suis tombé sur énormément d’informations et mon constat est qu’elles étaient là mais qu’elles n’étaient pas forcément accessibles et par moment incompréhensibles. Ma formation d’ingénieure en communication m’a poussée à structurer l’information dans un premier temps pour moi-même afin de donner des aliments de qualité à ma fille. Par la suite, en discutant avec d’autres mamans qui se posaient aussi les mêmes questions; j’ai pensé à faire un Ebook pour diffuser les informations et les rendre accessibles à tous. Sauf que l’on m’a fait comprendre qu’un livre aurait été mieux. D’une pierre deux coups, j’ai écrit le premier tome assez rapidement. Il a été très bien accueilli par la communauté qui m’a demandé une suite. Je me suis inspiré du développement de ma fille pour écrit le Tome 2 ainsi que le 3. Là encore, j’ai remarqué que la diversification alimentaire se faisait sur du long terme et sur différentes étapes cruciales. A savoir, l’introduction de l’aliment le plus basique possible. Progressivement, se rajoutent la matière grasse, les protéines animales, les produits laitiers et les céréales etc des étapes importantes pour le développement de bébé, pour autant, en équivalent, nous avons énormément de diversité et que nous n’en avons pas conscience de tout ce qui pouvait être donné à l’enfant, alors que la fonction primaire de la diversification est de présenter de la diversité dans l’assiette de bébé. Il est important de lui présenter cette diversité car, les apports des nutriments, des vitamines, des antioxydants sont des éléments qu’il ne fabrique pas lui-même et qui lui permettent de se développer et donc d’'être en bonne santé. Je prends un exemple assez simple, les antioxydants sont indispensables à l’enfant pour qu’il soit protégé des UVs, ou encore les pesticides. Donc, il prend toutes ces forces dans la nature, donc dans les aliments. D’où l’importance d’avoir des aliments de qualité et diversifiés. Préférable que ces aliments soient d’ici car, comme nous, il subit les mêmes agressions que nous, adultes et donc, il doit fabriquer ces mécanismes de défense donc en les consommant, ils se renforcent.
Ainsi, au-delà du simple fait gustatif, il y avait un réel enjeu de santé et malheureusement, si on ne le sait pas, on ne peut pas le comprendre, ni agir et, on ne peut pas prendre plaisir à s’ancrer tant sur le plan culinaire que gustatif.
De plus, en Guadeloupe mais plus largement, aux Antilles, nous avons une belle diversité de couleurs, de textures et de saveurs. Nous avons aussi une saisonnalité plus qu’intéressante. Mon objectif reposait sur cette volonté de communiquer sur tout cela et d’apporter l’information utile et pratique. Le tout basé sur cette volonté de nourrir correctement nos enfants, ce qui est parfaitement légitime. Vouloir nourrir son enfant avec des aliments colorés, savoureux et équilibrés, est tout à fait légitime.
Mon autre objectif était de montrer que nous pouvons avoir le choix et que nous pouvons transformer nos habitudes de consommation. Nul besoin d’un Bac +5 ou d’avoir fait l’ENA pour comprendre les bienfaits de bien nourrir son enfant. (rires). J’ai donc créé les guides pratiques qui vont d’ailleurs continuer de remplir leur mission, car ils aident beaucoup de familles et enfin les pots qui sont partis d’une demande de ces personnes. Ils étaient dans la continuité de la volonté des parents de nourrir correctement leurs enfants mais qui comme moi, soit ils n’avaient pas forcément le temps ou l’envie de passer en cuisine.
C’est donc mon engagement pour ma communauté, si en plus je peux créer une dynamique économique, de l’emploi donc pourquoi pas. Je ne pensais vraiment pas arriver à ce stade. Je voulais simplement améliorer le quotidien des familles. Je m’y suis attelé et je continue dans cette voie.

The Link Fwi : Quel est votre public cible et comment peut-il découvrir vos productions ?
Rachel Lollia : Le public sont les parents, notamment les jeunes parents qui ont envie d’avoir des informations sur la diversification alimentaire, qui ont envie de s’y lancer de façon sereine, ludique et fun, car il faut prendre plaisir de faire ces choses. En général, ce sont des personnes actives. Elles n’ont pas forcément le temps de passer à l’action. Elles peuvent donc trouver ces produits assez rapidement, sans pour autant faire de compromis sur les valeurs qui les animent. Justement, concernant ces valeurs, ce sont des personnes qui sont fortement attachées à l’ancrage culturel et traditionnel, ainsi qu’à tout ce qui nous identifie en tant que Guadeloupéen. Ce sont aussi des personnes qui ont un attachement pour tout ce qui est économie sociale et solidaire. A savoir la valorisation de l’humain, valorisation de la biodiversité. Le tout reposant sur des valeurs éthiques. Cela signifie, produire cohérent avec une démarche écoresponsable respectueuse de l’humain, (conditions de production), soutien à l’agriculture locale et biologique. Travail en circuit court.
TLFWI: Est-ce vous qui êtes à la cuisson des aliments ? Et quels sont les types d’aliments que vous proposez ?
Rachel Lollia : C’est marrant, on me le demande souvent mais, non. Je ne suis pas wonder woman non plus (rires). Quand je me suis lancée dans la confection de ces petits pots, il était hors de question que je fasse la production alimentaire dans ma cuisine personnelle. Premièrement, ce n’est pas adapté, puis pour être honnête, je ne voulais pas me prendre la tête. Ensuite, je souhaitais que cette action reste avant tout du plaisir, surtout que, bien que j’aime manger, je n’aime pas cuisiner. (rires)
De plus, il était important pour moi, de mettre en place cette dynamique pour démontrer la faisabilité de la création de ces unités semi industrielles à l’échelle du territoire. Je me suis entouré d’ingénieurs agroalimentaires dont c’est le métier. En plus, ils aiment inventer des nouveautés culinaires. D’ailleurs, avoir une équipe compétente a été pour moi la première étape, et cela a été mon plus gros investissement, la ressource humaine. C’est donc cette petite équipe qui est dans la production et moi, je fais fonction de coordination dans la gestion du projet. Je suis plus forte avec mon cerveau qu’avec mes mains. Je participe aussi mais, on me guide. Ce qui veut dire que lorsque je suis en production, je suis totalement au service de ma responsable de production. S’il faut faire la plonge, je la fais. S’il faut éplucher, pareil, je m’y colle (rires). Je les laisse complètement faire car, comme je le dis, chacun son domaine.
The Link Fwi : Quels sont les aliments que vous proposez ?
Rachel Lollia : A ce jour, nous proposons, des légumes verts, une association féculents légumes et des fruits. Très bientôt, nous aurons de la viande, cela prend du temps car, en termes de réglementation, il y a des normes à respecter, c’est donc plus compliquer à proposer. Après, l’enfant en très bas âge n’a pas forcément besoin de viande pour son développement. Ce n’est donc pas une priorité. En plus, aux Antilles et dans l’Outre-mer, nous avons une véritable biodiversité végétale. Les personnes qui souhaitent rajouter les dix grammes de viande, peuvent le faire. Mais, très bientôt on proposera de la viande et d’autres protéines animales comme végétales.

TLFWI : La crise sanitaire a-t-elle freiné votre activité ou au contraire fusse le bon moment pour penser, réfléchir au développement de Ti Po Péyi ?
Rachel Lollia : Non, bien au contraire. Le confinement fût même une opportunité car, dans premier temps, nous avons pu avoir l’attention des gens vu que tout le monde était chez soi sans aucune activité. Ce fut le bon moment pour lancer le financement crownfunding. Une opportunité car, comme la théorie de Schumpeter le dit, lorsque tout va mal, c’est le moment de créer quelque chose de bien. Cependant, ça reste un moment particulier, vu que nous avons dû reporter le lancement de notre projet d’un mois. Pourtant, je vois les choses positivement, car le lancement que nous avons fait n’avait rien avoir avec celui que nous pensions faire. Ce n’est pas plus mal au final.
The Link Fwi : Quels sont vos objectifs à long terme ?
Rachel Lollia : En termes d’objectifs, déjà finir de mois-ci et tenir le trimestre prochain (rires). Se développer. Cependant, l’objectif à très long terme est d’être une structure impactante et importante pour le développement du territoire et à l’issue de notre initiative, j'espère que d’autres se feront et que des personnes s’en inspirent afin de pouvoir créer des projets aussi gros, même moi je ne m’en rends pas compte tous les jours, afin que nous puissions avoir nous aussi, en Guadeloupe et dans l’Outre-mer, nos licornes (terme attribué aux start up qui créent de la valeur économique).
TLFWI : Pourquoi avoir initié le Ti Po Péyi tour ?
Rachel Lollia : C’est avant tout parti d’un coup de tête. Tout repose encore une fois sur l’interaction. C’est lors d’un échange avec l’équipe que nous avons relevé des problématiques. Il faut savoir que j’adore ces moments de Brain storming où l’on relève un problème et que notre mission est de parvenir à le résoudre. La nôtre en l’occurrence était que nous étions à une semaine du lancement, nous ne savions pas s’il nous était possible de le faire. L’une d’entre nous, lance de façon tout à fait anodine, qu’il nous faudrait un truck pour aller à la rencontre du public. Nous avons commencé des recherches. Nous sommes tombés sur cette remorque, qui était disponible. On a saisi la chance. Par la suite, nous nous sommes dits qu’au lieu de faire une inauguration, il nous faudrait faire une inauguration itinérante sur un mois qui nous permettrait de faire toute la Guadeloupe, comme ça on n’oublierait personne. Sachant que notre objectif était de faire connaître le produit pas uniquement parler de la marque, mais vraiment démontrer que le produit était qualitatif et pragmatique, puisqu’il y a toute la richesse de notre biodiversité. C’est donc faire simple et efficace. Par ailleurs, vu que j’aime goûter et tester ce que je suis amené à acheter, il était évident que nous laisserions les clients tester avant achat. Il y a donc une démarche de proximité, parce que nous ne sommes pas juste une marque de consommation mais nous voulons être une marque communautaire, de sens et c’est de là qu’est parti le Foodtruck tour. C’est d’autant plus un travail d’équipe qui nous active toutes. Quand nous finissons le week-end, dès le lundi, nous nous activons pour préparer le tour du week-end suivant. Le fait d’être en équipe ça aide. Seule, je n’y arriverais jamais.

The Link Fwi : Peut-on vous suivre sur les réseaux sociaux, êtes-vous présente justement sur ces plateformes ?
Rachel Lollia : Nous sommes bien sûr sur les réseaux sociaux. Vos lecteurs et lectrices potentiels clients peuvent suivre le Foodtruck tour via ce lien : ( Tournée de lancement Ti Po Péyi (notion.site) ) Nous avons déjà fait la Grande-Terre, nous allons faire la Basse-Terre, il y a des communes où nous allons revenir, mais nous finirons par les villes du centre de la Guadeloupe. Nous avons aussi notre site : Accueil TI PO PEYI
Ce que j’aime sur ce tour, c’est avant tout l’énergie. Les gens sont agréables, réceptifs, ça fait du bien. Je trouve vraiment dommage que dans le business on s’adresse à de l’humain. Vous l’aurez compris j’ai un côté altruiste, je crois que toute la puissance de l’humanité se trouve dans sa simplicité. Être aussi proche des gens me satisfait car il n’y a pas qu’un produite entre eux et moi. Il y a un vrai lien qui se créé et ça m’enchante. C’est fatiguant, c’est long mais ça en vaut la peine.
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