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Coronavirus : l'internationalisme médical cubain au service des Antilles-Guyane


Les Antilles-Guyane ne sont pas épargnées par l'actuelle pandémie de Coronavirus. Jour après jour, ces territoires ultramarins voient le nombre de cas confirmés augmenter. Sur place, les services de santé manquent de tout, masques, gants, appareils respiratoires et surtout il manque du personnel. Face à ces problématiques, les sénateurs de la Martinique et de la Guadeloupe ont demandé au Gouvernement de facilité la venue temporaire de médecins étrangers dans ces régions. Ce matin l'a validé par décret.

S'il y a bien une chose qu'un service hospitalier se passerait bien, c'est d'une épidémie. Les risques de propagation dans la société civile, l’afflux de malades, les services de santé débordés à la limite de la saturation, risque de contamination des personnels soignants. Depuis le début du mois de Mars, les équipes médicales en France Hexagonale sont confrontées à l'une des plus grandes épidémies de l'histoire contemporaine, le CORONAVIRUS avec son appellation COVID-19.

A ce jour, selon santé publique France, sur l'ensemble du territoire national 52 128 cas ont été confirmés dont 3 525 décès. Dans l'ensemble de l'Outremer, 709 cas confirmés et 11 décès sont comptabilisés. Les Antilles-Guyane, à savoir Saint-Martin-Saint-Bathélémy, la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane ne sont pas épargnées par l'actuelle pandémie, elles figurent même parmi les régions les plus touchées. Jour après jour, ces territoires, déjà confrontés à des problématiques d'ordre sociales et sanitaires se sont retrouvées confrontées à une véritable crise sanitaire, non pas liée à l'afflux de malades, mais par rapport au fait que, sur place, les services de santé manquent de tout, masques de protection, gants mais aussi et surtout, les centres hospitaliers manquent d'appareils respiratoires indispensables dans cette " guerre contre le Covid-19". En effet, les appareils servent à relayer les poumons pour alimenter le sang en oxygène car, le virus altère gravement les alvéoles pulmonaires au point qu'un masque à oxygène ne suffit plus. Face au manque, à travers toute la France, les professionnels de la santé utilisent des appareils de ventilation mécanique, mais bien moins performants que ceux attendus.

De plus, ce n'est pas simplement les appareils respiratoires qu'il manque, les hôpitaux ultramarins manquent de personnel, résultat de vingt ans de politique d'austérité opérée par les gouvernements précédent qu'ils aient été de droite comme de gauche. Concéquence de quoi, les personnels soignants travaillent en sous-effectif, et tentent tant bien que mener les missions à bien.

Pour palier au manque, les sénateurs Catherine Conconne et son collègue Dominique Théophile, sénateur de Guadeloupe ont formulé une demande toute à fait exceptionnelle au Gouvernement : l'envoi de médecins et infirmiers(ères) vers ces régions qui comptent à elles seules : pour la Martinique 128 cas dont trois décès, en Guadeloupe 114 cas et cinq décès, et à Saint-Martin / Saint-Barthélémy : 27 cas et deux décès. Selon nos confrères de France-Antilles, il s'agit d'une mesure réclamée par le sénateur Dominique Théophile qui, dans la continuité de l’amendement qu’il avait porté avec son homologue de Martinique, Catherine Conconne — voté en mai 2019, dans le cadre de la loi du code de la santé publique du 24 juillet 2019 (L.4131-5), portant sur la transformation du système de santé par la venue temporaire de médecins étrangers en Guadeloupe —, sollicitait son application urgente au président de la République.

Après un lutte acharnée, les deux sénateurs ont eu satisfaction. Contraint par l'actuelle pandémie de Coronavirus, le Gouvernement a finalement accepté d’accueillir des médecins cubains sur son sol. Finalement ce ne seront pas uniquement la Martinique et la Guadeloupe qui seront concernées mais aussi la Guyane et Saint-Pierre-et-Miquelon

La sénatrice de la Martinique, Catherine Conconne, se réjouit que son amendement soit passé par décret : « Il a été pris principalement pour renforcer nos CHU. Il nous manque certaines spécialités médicales et nous avons du mal à faire venir des médecins d’Europe. Cet amendement nous permet d’aller puiser dans nos ressources fraternelles cubaines. Donc, pour moi, c’est une victoire, une grande joie. Que ce décret arrive en pleine crise du coronavirus, c’est très bien ».

Une décision acclamée par la communauté médicale de ces territoires d'Outre-mer. Par exemple à La Martinique, le CHUM (Centre Hospitalier Universitaire de Martinique) a dû lancer ces derniers jours via des clubs services, un appel sollicitant des bénévoles, des libéraux et des dons (masques, gels hydro-alcooliques, gants, sur-blouses jetables…) en prévision d’une recrudescence de malades atteints du covid-19. L'arrivée de médecins et infirmières expérimentés dans la gestion de pandémie, est même salutaire. Pour rappel, de 2010 à 2014, Cuba a été en première dans la lutte contre le Choléra qui a touché Haïti et durant la même période, des médecins cubains été envoyé 37 pays d'Afrique de l'Ouest pour lutter contre l'Ebola.

Ainsi après l'Italie et l'Espagne deux des principaux foyers en Andorre, l'Outre-mer français devient le nouveau théâtre des opérations médicales de l'internationalisme cubains dans des pays "développés". Plus récemment, c'est la principauté d'Andorre qui a fait appel aux cubains pour leur prêter main forte face au COVID-19. La petite principauté de 70.000 habitants, située entre deux des pays européens les plus touchés par la pandémie la France et l'Espagne a enregistré 267 cas dont trois décès. Dans la région Caraïbe, l'île communiste apporte son aide médicale à plusieurs pays parmi lesquels la Jamaïque où 140 médecins et infirmiers(ières) ont été envoyés, mais aussi au Venezuela qui accueille 130 professionnels cubains, Haïti ( 200 professionnels de la santé), sans oublier le Suriname (51 médecins et infirmiers), le Belize ou encore l'île de Grenade où 5 médecins ont été envoyés.

Une histoire de l'aide médicale de Cuba :

L'île communiste qui vit sous embargo depuis plus cinquante ans a acquis une excellente réputation internationale en matière de santé. Depuis 1959, date de sa prise de pouvoir, le régime communiste a mis l'éducation et surtout la santé au centre de ces priorités nationales. La plus grande île des Caraïbe est régulièrement citée en exemple par les ONG et par l'Unesco notamment. Education gratuite, services de soins entièrement gratuits. Cuba figure dans les classements des pays ayant les meilleurs IDH ( 67e place en 2016, ce qui la situe parmi les pays à développement humain élevé). des chiffres qui assure à Cuba une certaine réputation internationale mise en pratique par la politique de coopération médicale avec les autres nations, parmi les plus pauvres de la planète. Une politique menée dès les premiers jours de la révolutions castriste lorsque la quasi totalité des médecins et spécialistes de l'île ont préféré quitté Cuba. plutôt que de voir leur niveau de vie baisser. La moitié des 6912 médecins abandonnent alors ainsi l'île. plutôt que de voir leur niveau de vie baisser. La moitié des 6912 médecins abandonnent alors ainsi l'île. Pour faire face à cette fuite des cerveaux, le nouveau gouvernement dirigé par Fidel Castro se tourne vers les campagnes de l'île en recrutant des jeunes campagnards connaissant bien la vie tropicale et met en place un système de formation rapide. Leur première mission se fera en Algérie en 1963. La jeune nation algérienne à la fin de la guerre de décolonisation qui l'opposait à son ancienne puissance coloniale est en déficit de personnel médical à la suite du retrait des médecins français. Des soldats et des enfants blessés sont aussi transférés à Cuba afin d'être traités lors de cette opération, malgré la pénurie de professionnels de la santé, la mission cubaine est un succès. L'expertise médicale des cubains est dès lors reconnue.

Suivront plusieurs dizaines de missions à l'étranger. Guerre Froide oblige, Cuba propagera à travers la coopération médiale sa vision du socialisme. Guinée-Bissau, Cap-Vert, Guinée Equatoriale, Congo, Mozambique, Ethiopie partout où de jeunes nations accèdent à l'indépendance dans des luttes acharnées contre les puissances coloniales européennes on retrouvera non seulement des militaires cubains mais aussi des médecins et autres spécialistes cubains. C'est d'ailleurs durant les guerres d'indépendance et civiles angolaises que l'on retrouvera à la fois des personnels militaires mais aussi des milliers de médecins et infirmières. En 1979, Fidel Castro envoya des médecins cubains aux côtés des Sandinistes qui venaient de prendre le pouvoir au Nicaragua. Plus récemment, c'est en Haïti que l'expertise des médecins a été reconnue lors de l'épidémie de Choléra qui a frappé la première république noire entre 2010 et 2013. On a pu aussi voir des médecins cubains intervenir dans les favelas au Brésil mais également au Venezuela, Bolivie, Nicaragua, Salvador, Guatemala, dans les quartiers pauvres d'Afrique du Sud, ou encore dans plusieurs pays d'Afrique de l'Ouest, lors de l'épidémie d'Ebola. Ainsi, pendant quatre décennies, Cuba a envoyé 67 000 professionnels de la médecine dans le cadre de programmes de coopération, généralement pour une période d'au moins deux ans dans 94 pays une moyenne de 3 350 professionnels travaillant à l'étranger chaque année entre 1960 et 2000. Selon les derniers chiffres de 2016, les médecins cubains sont présents dans 62 pays : 24 pays d’Amérique latine et des Caraïbes, 27 d’Afrique subsaharienne, d’Asie orientale et du Pacifique, deux du Moyen Orient et d’Afrique de l’Est, ainsi qu’en Russie et au Portugal. Aujourd'hui on dénombre 29 071 médecins cubains opérant à travers le monde ( voir la carte ci- dessous).

A la chute de l'Union Soviétique, au début des années 1990, l'île communiste fortement liée à son ancien allié russe, a été confrontée à une grave crise économique. Beaucoup d'experts internationaux, pariaient même sur la chute du régime castriste qui pourtant s'est rapidement adapté à la situation. Le régime communiste a entamé une métamorphose de son économie " socialiste". Ces dernières années, La Havane a misé sur le tourisme pour booster son économie moribonde, frappée depuis 1959 par les sanctions américaines. En moins de deux décennies, le tourisme est devenu une manne financière considérable pour la plus grande île de la région. En 2016, année du rapprochement avec le puissant et ennemi américain, quatre millions de touristes ont visité l'île. En 2017, ils étaient environ 5 millions ( dont 619.523 visiteurs américains) à se rendre à Cuba. Des chiffres plutôt encourageant pour un pays sous embargo. Mise à part le tourisme, Cuba mise également sur la santé comme un vecteur économique. Selon José Luis Rodriguez Garcia, ancien ministre de l’économie, la coopération médicale internationale rapporterait 11 milliards de $ en moyenne par an à Cuba, qui facture la coopération dans 35 des 63 pays bénéficiaires. En 2018, l'île socialiste enregistrait 6,398 milliards de dollars de recettes de la coopération médicale. Une baisse considérable liée principalement à la fin de plusieurs de ses programmes au Brésil, en Equateur ou encore en Bolivie, d'anciens alliés qui ont basculés à droite. Malgré cela l'internationalisme médicale reste la première ressources de l'île, loin devant le tourisme, qui ne rapporterait ( selon les chiffres de 2016) que 3 milliards de dollars. On peut donc dire que l'envoi de médecins à l'étranger reste la principale source de revenus externes pour l'économie. Très controversée, accusée même d'esclavagisme par les Etats-Unis, les bénéfices (75 à 89% du montant des salaires) de la coopération médicale permettent selon les autorités cubaines de financer l'éducation et la santé.

Suite à la politique hostile de Donald Trump avec Cuba, des pays ont décidé de renvoyer les médecins à la Havane, dont la Bolivie, l'Equateur, le Salvador ou encore le Brésil. Ce qui n’a pas empêché de nombreux pays, en difficulté avec la propagation fulgurante du nouveau coronavirus, de faire appel à la Havane. Par ailleurs, en venant en aide à des pays occidentaux comme la France ou encore l’Italie, La Havane espère également renforcer ses liens avec ces pays à l'avenir. Entre l’embargo américain et les multiples sanctions prises à son encontre, les finances cubaines sont étouffées depuis des décennies. Nouer des liens sur chaque continent peut avoir un retour diplomatique aussi important que le côté financier.

De plus, obéissant à la doctrine castriste, ces soldats en blouse blanche vont démontrer que la coopération médicale entre pays, peu importe le système politique est possible. C'est d'ailleurs ce que Fidel Castro avait souligné en 2003, lors d'un voyage officiel en Argentine : « Notre pays ne lance pas de bombe contre d'autres peuples. Il n'envoie pas de milliers d'avions bombarder des villes. Notre pays ne possède pas de bombe nucléaire, ni d'armes chimiques, ni d'armes biologiques. Les dizaines de milliers de scientifiques que comptent notre pays, ses médecins, ont été formés pour aider et sauver des vies. Vive la Fraternité entre les Peuples ! Vive l'Humanité ! Hasta la Victoria Siempre ! »

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