L'annonce a fait le tour des médias, l'écrivain martiniquais, Patrick Chamoiseau auteur du célèbre Texaco avec lequel il a remporté le Prix Goncourt en 1992 est désormais le nouveau titulaire de la Chaire d'écriture de Science Po Paris. L'écrivain a pris son nouveau post ce mois-ci.
Après Kamel Daoud et Marie Darrieussecq, Patrick Chamoiseau est le nouveau titulaire de la chaire d'écrivain en résidence de l'établissement d’enseignement supérieur et de recherche Sciences Po. créée en 2018, « pour renforcer l'expression créative des étudiants et leur permettre de développer une réflexion critique et originale. Elle est rattachée au Centre d’écriture et de rhétorique de Sciences Po », précise l’institution.
La passation, modérée par le journaliste et enseignant à Sciences Po Ali Baddou, s'est déroulée dans l’Amphithéâtre Simone Veil où les deux auteurs « échangeront notamment sur l'importance de l'écriture, des langues, de l'imaginaire et sur leur rôle de titulaire de la Chaire d’écrivain en résidence », indique un communiqué de Sciences Po.
La présence et les interventions d'un auteur offrent la possibilité de « renforcer l'expression créative des étudiants et [de] leur permettre de développer une réflexion critique et originale ». La chaire d’écrivain en résidence s’insère dans l’offre pédagogique du Centre d’écriture et de rhétorique ouvert en septembre 2018, dont les cours et activités s’organisent autour de trois axes principaux : l’argumentation, les arts oratoires et l’écriture créative.
Deux cours hebdomadaires :
Durant ce premier semestre 2020, l’écrivain martiniquais donnera deux cours hebdomadaires (de 24 heures chacun au total). Le premier s’intitule « Vivre en mondialité, écrire en relation ». « La question est : est-ce que le monde est dans la langue ? », annonce le descriptif de l’enseignement. « Un écrivain est un artiste qui chemine de manière individuelle, très singulière, vers cette énigme indépassable qu'est la littérature. Son œuvre est donc un cheminement vers la compréhension de l'art qui est le sien. »
Le deuxième cours se nomme « Catastrophe et langage ». « Aujourd'hui, la littérature n'habite pas des langues, ni d'ailleurs des "styles", elle n'est ni dans la défense ni dans l'illustration d'un idiome national, elle habite des langages. Tout écrivain construit son langage dans les langues matricielles qui lui sont données ; pour moi c'est le créole et le français, les deux s'articulant dans le désir-imaginant de toutes les langues possibles », relève Patrick Chamoiseau lors de la présentation.
Au programme des cours, outre certains livres du lauréat du Goncourt comme « Écrire en pays dominé » et « Solibo Magnifique », on trouve des œuvres d’Aimé Césaire (« Moi laminaire »), d’Edouard Glissant (« Philosophie de la relation » et « Malemort »), ainsi que de Saint-John Perse, de Faulkner, de Garcia Marquez, de Rabelais, de Segalen, de René Char, et d’autres qui seront annoncées lors des enseignements…
Biographie :
Né le 3 décembre 1953 à Fort-de-France (Martinique). Après des études de droit et d'économie sociale en France, il devient un travailleur social, d'abord dans l'Hexagone, puis en Martinique. Inspiré par les travaux d'Édouard Glissant, Patrick Chamoiseau rentre en Martinique et s'intéresse de près à la culture créole.
Il publie son premier roman en 1986. Il obtient la consécration en 1992 en gagnant le prix Goncourt pour son roman Texaco, une œuvre vaste présentant la vie de Martiniquais sur trois générations. Ce roman revisite l'épopée du petit peuple martiniquais à travers le récit du combat des habitants d'un bidonville situé en bord de mer, près des raffineries de Fort-de-France. Il évoque ainsi le combat pour la sauvegarde de certains modes de vie authentiquement créoles. Texaco est reconnu comme l'une des œuvres antillaises majeures de la fin du xxe siècle.
Son œuvre dépeint les traits de la culture populaire martiniquaise, celle des petites gens et de leurs combats et interroge également les formes d'expression créoles. Prenant acte de l'existence d'une culture créole essentiellement travaillée par l'oralité, il envisage le développement d'une littérature orale pour laquelle l'écrivain, héritant des tournures orales et des conteurs créoles, aurait pour rôle de s'ériger en « marqueur de paroles ».