Homme de paix, homme d'Eglise, ardent défenseur, le cardinal Jaime Ortega est décédé. Il avait joué un rôle-clé dans le rapprochement historique entre Cuba et les États-Unis, fin 2014, mais aussi dans le dialogue entre Église et autorités cubaines. Il avait 82 ans.
Né le 18 octobre 1936 dans le village de Jagüey Grande (ouest), il a étudié quatre ans au Canada avant de s’insérer dans une institution catholique cubaine qui était alors fortement sous influence espagnole et financée par les États-Unis. Il a su « cubaniser » l’Église catholique — qui ne regroupe que 10 % des 11,2 millions de Cubains — et la rapprocher des cultes afro-cubains chers à la grande majorité de la population.
Homme de paix mais avant tout, homme d'Eglise, le cardinal Ortega a passé 35 années à la tête de l’Église cubaine avant de présenter sa démission en 2011, comme l’y obligeaient les règles vaticanes lorsqu’un archevêque atteint 75 ans. Mais le pape françois , dont il est un ami proche et qu’il avait reçu sur l’île en 2015, ne l’a acceptée qu’en 2016. Le cardinal était d’ailleurs son messager au cours des 18 mois de négociations secrètes qui ont mené à l’annonce inattendue d’un rapprochement entre Cuba et les États-Unis en décembre 2014.
Sa détermination et sa patience lui avaient permis d’ouvrir en mai 2010 un dialogue direct et inédit avec Raúl Castro, alors président, dont le résultat le plus flagrant fut la libération de quelque 130 prisonniers politiques. Ce dégel fut accompagné par un échange de prisonniers entre les anciens ennemis de la guerre froide, puis de la visite historique du président américain Barack Obama sur l’île en 2016. Il n’aura toutefois été que de courte durée, l’arrivée à la Maison-Blanche de Donald Trump en 2017 ayant été accompagnée d’une salve de sanctions contre Cuba, pour son soutien au gouvernement vénézuélien de Nicolas Maduro.
Reconnu par le rapport de 2010 du département d’État américain sur la liberté religieuse, le travail du cardinal Ortega a également suscité de dures critiques d’opposant radicaux et d’anticastristes exilés qui l’accusaient de « collusion » avec le régime communiste et de promouvoir l’exil des opposants. Il avait 82 ans.