Dimanche, nous connaîtrons le vainqueur de ce choc gauche-gauche. Entre Manuel Valls et Benoît Hamon la rupture est consommée. Deux programmes, mais aussi deux visions de la France opposent les deux anciens ministres. Pour rappel, Benoît Hamon a surpris tout le monde en se plaçant en tête du premier tour, Manuel Valls lui, bénéficie d'un fort soutien en Outremer.
Les deux qualifiés pour le second tour de la primaire de la gauche s’opposent sur de nombreux points de leurs programmes, de l’écologie à la sécurité en passant par la réforme des institutions.
Deux jours après le débat qui l'opposait, au favoris de la primaire citoyenne, Manuel Valls a révélé qu'il ne soutiendrait pas Benoît Hamon en cas de défaite : " Si Benoît Hamon gagne la primaire de la gauche, "je m'effacerai....Je ne pourrai pas défendre son programme" a déclaré vendredi Manuel Valls sur BFMTV et RMC, celui-ci refuse de rejoindre la ligne de son adversaire, trop éloignée de la sienne.
A lui de poursuivre, "Donnez-moi la force de l'emporter, parce que si ce n'est pas moi, au lendemain de cette primaire, nous ne sommes pas en capacité de résister, là Mélenchon, ou là Macron..."Moi je suis au coeur des progressistes, de Hamon jusqu'à Macron, parce qu'il faut rassembler".
Entre Manuel Valls et Benoît Hamon la rupture semble être consommée. Ce sont deux programmes, mais aussi deux visions de la France opposent les deux anciens ministres. Petit coup d'oeil rapide aux idées qui les dissocient.
- Revenu universel: le clivage :
Benoît Hamon en a fait l'axe central de sa campagne: un revenu universel versé à tous les citoyens. Il s'agit d'un objectif à long terme. Dans un premier temps, le RSA serait augmenté de 10%, à 600 euros mensuels, et un revenu d'existence versé à tous les jeunes. Puis une "conférence citoyenne" fixerait le périmètre et le calendrier de cette réforme.
Manuel Valls refuse de verser à tous les Français une allocation, au "coût exorbitant", mais propose de leur garantir un minimum décent d'environ 800 euros par mois: ceux dont les revenus n'atteindraient pas cette somme recevraient une allocation, assez proche dans son esprit de l'actuel RSA.
Le sort de la loi travail :
Manuel Valls continue à défendre comme "une avancée" la loi travail qu'il avait fait voter aux forceps lorsqu'il était Premier ministre.
Benoît Hamon, qui s'était opposé à ce texte à l'Assemblée, entend l'abroger pour en particulier rétablir "la hiérarchie des normes": le code du travail doit selon lui primer sur les accords de branche ou d'entreprise.
Budget: respecter ou non les 3% :
Benoît Hamon refuse de devoir maintenir le déficit budgétaire dans la limite de 3% du PIB inscrite dans le traité de Maastricht, inatteignable "dès lors qu'il faut procéder à des investissements importants".
Manuel Valls veut "maintenir le déficit juste sous la barre des 3%" mais "sans chercher à le réduire davantage".
Impôts: priorités différentes :
Pour favoriser le pouvoir d'achat, Manuel Valls veut rétablir -en la plafonnant- une mesure adoptée par la droite puis supprimée par la gauche: la défiscalisation des heures supplémentaires. Il promet de rétablir l'avantage fiscal (la demi-part) dont bénéficiaient les veuves et veufs ayant élevé des enfants, qu'avait supprimé la droite et que la gauche n'avait pas rétabli.
Benoît Hamon défend la fusion de la CSG et de l'impôt sur le revenu, estimant que cela introduirait plus de justice fiscale. Il propose aussi de fusionner l'impôt de solidarité sur la fortune et la taxe foncière. Il veut enfin faire payer des cotisations sociales aux employeurs remplaçant des salariés par des robots.
Ecologie: question de dosage :
A l'horizon 2025, sortie du diesel grâce à la fin de l'avantage fiscal et 50% d'énergies renouvelables, et au fil du temps, fermeture des centrales nucléaires en fin de vie: Benoît Hamon insiste sur ses engagements écologistes.
Manuel Valls se montre plus prudent, parlant simplement "d'accélérer la convergence des fiscalités essence et diesel", mais réaffirme que la part du nucléaire dans la production d'électricité passera de 75% à 50% d'ici 2025. Et face à Donald Trump, il veut instaurer une taxe carbone sur les produits américains si l'accord de la COP 21 était remis en cause.
Laïcité et asile :
Manuel Valls veut intégrer dans la Constitution une charte de la laïcité "qui lutte contre tous les communautarismes sans jamais pointer du doigt tel ou tel pour sa croyance". Il assume et veut poursuivre la politique migratoire menée à Matignon, appelant à "ne pas confondre droit d'asile et migration".
Benoît Hamon se veut "beaucoup plus généreux en matière de droit d'asile" et appelle de ses voeux des "accommodements qui dans le respect de la laïcité et des principes de la République permettront à l'islam en France de trouver une place semblable à celle des autres religions".
Ve ou VIe République :
Benoît Hamon veut aller vers une VIe République par une série de réformes: référendum d'initiative populaire permettant d'abroger une loi, septennat non renouvelable, tirage au sort d'une partie des sénateurs, reconnaissance du vote blanc, introduction d'une dose de proportionnelle pour l'élection des députés...
Manuel Valls n'entend pas changer de régime politique, mais promet d'instaurer une consultation citoyenne avant le vote des lois.
Les deux hommes veulent réduire à trois le nombre de mandats électifs successifs, et limiter aux textes budgétaires le recours à l'article 49.3 de la Constitution (adoption d'un texte sans vote), auquel Manuel Valls avait pourtant recouru à la tête du gouvernement.
Cannabis : l'opposition :
Benoît Hamon prône la légalisation de l'usage du cannabis, pour "tuer les trafics".
Manuel Valls refuse une telle libéralisation qui n'empêcherait pas selon lui les trafics de continuer.
International :
Au niveau international, Benoît Hamon veut une reconnaissance d'un Etat Palestinien. Manuel Valls lui, préfère consacrer son programme sur l'Afrique en créant un Erasmus Euro-africain.
Par contre les deux candidats se rejoignent sur la question de la sécurité européenne. Ils veulent promouvoir une alliance militaire européenne alternative à l’OTAN.