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E.L.M.S

[Critique] : LE GWOKA : UNE IDENTITE GUADELOUPEENNE.


Le gwoka, c'est une culture, une musique, une tradition, c'est aussi sept rythmes, plusieurs variantes, une danse. Véritable identité de la Guadeloupe, le Gwoka est apparu au début du XVIIe en pleine période esclavagiste.Depuis, le Gwoka est devenu l'âme de la Guadeloupe. Pour comprendre le Gwoka il faut connaître la Guadeloupe, car l'histoire de l'île va de paire avec cette "musique" symbole de ce mélange des peuples.

Le Gwoka : Une culture, une tradition :

En Guadeloupe, on ne badine pas avec le Gwoka. Véritable identité de l'île, le Gwoka est en premier lieu une culture, une tradition. Né à une sombre période de l'histoire des guadeloupéens, le Gwoka fut importé par les esclaves africains. Né dans la douleur de ces êtres humains exploités, il est depuis représentatif de la société guadeloupéenne.

L'Histoire du Gwoka remonte à l'arrivée des premiers esclaves dans l'île. Originaires de différentes régions africaines, le tambour était le seul moyen qui leur permettait d'échanger entre eux, car ils ne parlaient pas la même langue.Il fut utilisé comme moyen de communication entre les esclaves des différentes habitations sucrières de l'île. A l'époque, quand une révolte s'organisait dans une plantation, c'est par le tambour que l'information se transmettait. Le Gwoka était aussi un échappatoire à cette vie de souffrance qui leur était réservée. Détesté par les colons de l'époque, les joue

urs de tambour étaient souvent traqués. Une fois l'esclavage abolit en 1848, les lois assimilationnistes rejetèrent cette musique identitaire, car elle ne reflétait pas la culture française. Longtemps considéré comme une musique d'esclaves ou de grossiers personnages, le gwoka comme la langue créole fut interdit et même renié par une partie de la population guadeloupéenne.

Il faudra attendre le début des années 1960, avec l'émergence des mouvements identitaires et indépendantistes pour que le gwoka connaisse un nouveau souffle. Désormais il est associé à de grands noms tels que Marcel Lollia dit Vélo, mais aussi Napoléon Magloire, Anzala, sans oublier Ti Céleste ou Germain Calixte dit Chaben etc. A l'origine pratiqué par les esclaves noirs, il est aujourd'hui, étendu à l'ensemble de la société Guadeloupéenne, qui s'est accaparée cette musique. Rejeté par le passé, il est depuis pratiqué à la moindre occasion. En Guadeloupe, désormais, il n'est pas rare d'entendre du tambour dans les rues de Pointe-à-Pitre le samedi, dans les églises où lors des veillées mortuaires. Le gwoka est surtout joué dans les manifestations sociales car c'est avant tout une musique de révolte avec des textes conscients, traitant des problèmes de la société guadeloupéenne. Durant les mouvements sociaux de 2009, c'est au son du tambour que des milliers de guadeloupéens marchèrent pour dénoncer les conditions de vie dans l'île et demander une justice sociale.

Le Gwoka : une musique, sept rythmes :

Le Gwoka est avant tout une musique, composée de sept rythmes qui tirent leur origine de la lointaine Afrique. Chaque rythme, son histoire, son origine et sa danse. Tous différents les uns des autres, ils peuvent être lents, rapides, langoureux, festifs, frénétiques et

envoutants.Ils accompagnaient le quotidien de l'esclave dans la plantation.

Le Kaladja est le premier des sept rythmes, il se joue de façon lente ou rapide. Il peut évoquer aussi

bien la joie que la souffrance. Originaire du Congo, le Kaladja comme l'ensemble des rythmiques gwoka serait issu de ce brassage culturel indo-caribéen et africain dont les guadeloupéens sont les dignes héritiers..

Le Tumblack est la rythmique la plus utilisée dans la fête ou les cérémonies. Il est festif! sa rythmique est festive et très souvent érotique.

Le Lewoz est le rythme le plus joué en Guadeloupe, c'est le rythme de référence en gwoka. Il est considéré comme un rythme de combat. Il a donné son nom a un rassemblement populaire qui se tient généralement les samedis soir. A l'époque les ouvriers se réunissaient le samedi, pour célébrer à leur façon le jour de paye.

Le Padjanbel ou Gwadjanbel, sont deux termes qui désignent le même rythme. Moins courant que les précédents, il est plus doux, plus noble car il exprimait le surpassement de la condition d'esclave. Joué dans les plantations, il exprimait l'élévation et l'envie des esclaves de sortir de la servitude, par le surpassement et la lutte.

Le Mennde, est le rythme le plus rapide, le plus festif de toutes les rythmiques gwoka. Il est souvent associé au libertinage, à la sensualité. A la différence des autres rythmes il est joué aux abords de la vie nocturne. Selon les experts, le Mennde serait la base du ZOUK que l'on connait aujourd'hui.

Pour finir, le Woulé, accompagnait la construction des routes en pavés de pierre. Les ouvriers concassaient les pierres à l’aide de leurs masses au rythme du WOULE. On le retrouve aussi dans les champs pendant les récoltes. Le woulé est le rythme du travail.

En Gwoka il existe d'autres rythmes, qui eux aussi ont leur importance dans le quotidien des guadeloupéens, mais ne sont joués qu'à de rares exceptions, c'est le cas du Léwòz de Jabrun, le menndé long, le sobo, le mayolè, le grap a konngo, le takout. A savoir que chacun des rythmes est rattaché à une région spécifique de la Guadeloupe.

Le KA, l'Instrument de prédilection du Gwoka

Il n'est pas possible de parler du gwoka sans évoquer son instrument le "KA", véritable instrument de vénération chez les guadeloupéens. Fabriqué à partir d'un tonneau de rhum que l'on creuse certains pensent que le mot ka vient du mot quart, du quart de tonneau (mesure utilisée en marine, le "r "ayant disparu), mais l'origine du mot, remonterait à l'Egypte Antique, où le mot ka désignait quelque chose de mystique, l'Âme ( voir les recherches du père Colbac sur le ka). Nous retrouvons en Afrique Centrale, le mot n'goka qui désigne un tambour qui rappelle beaucoup le ka). L'instrument que l'on connait aujourd'hui serait aussi présent dans d'autres pays de la Caraïbe, comme à Puerto-Rico où l'on dit "kua" et "Ka" à Cuba ou "Ka-tha-bou" en Haïti. Hérité des traditions africaines, les tambours "ka" à la différence de l'Afrique sont faits en "bois-fouillé", des morceaux de troncs d'arbre que l'on fouille afin d'obtenir un bouko (un tambour sans peau). Le "bois-fouillé" est aussi utilisé dans d'autres pays de la Caraïbe (Haïti, Cuba...). Pendant l'esclavage, il était interdit aux esclaves de couper des arbres. Ne pouvant fabriquer des "bois-fouillé" ils ont utilisé des petits tonneaux qui servaient à transporter du vin, de l'huile, des grains, de la viande salée.

Le gwoka se joue avec deux types de tambours aux rôles spécifiques : Le Boula qu est le plus gros des tambours avec un son grave, c'est celui qui soutient le rythme. Il joue les sons de bases et selon certains experts, son nom s'apparenterait au "m'bula" qui est le tambour spécifique du peuple bantou. C’est un tambour fabriqué à base de peau de cabri mâle.

Enfin il y a le Makè ou marqueur qui a un son plus aigu. Le Makè joue les solos et les improvisations durant le lewoz. Celui qui joue le rôle du Maké doit jongler avec les rythmes. Ce tambour est fabriqué à base de peau de cabri femelle.

Longtemps renié par la population guadeloupéenne, le gwoka connait une renaissance fulgurante. En 2014, il a été inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO et aujourd'hui, il a fait son apparition dans les musiques contemporaines telles que le Jazz : Gwoka-Jazz ou le rock-Ka !

E.L.M.S pour TheLinkFwi@ l'Actualité en un clic !!

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