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Cuba, histoire d'une île révolutionnaire : de l'esclavage au communisme #1

Dernière mise à jour : 30 mai 2020


Lorsque l'on évoque Cuba, on pense généralement aux plages caribéennes de sable fin agrémentées de cocotiers sur lesquelles on savoure un bon morito tout en fumant un bon gros Cohiba avec pour fond sonore dans ce décor idyllique de la Salsa dans les rues animées de La Havane. Cependant, durant cinquante ans, la plus grande île de la Caraïbe a été le gendarme du Tiers-monde. Durant cette période charnière de l'histoire humaine, le régime marxiste a envoyé des médecins, des conseillers militaires et même des militaires à des guérillas ou des régimes qui en formulaient la demande.





Pour beaucoup, Cuba est la destination touristique rêvée. L'île des Caraïbes a de tout temps fasciné l'imagination des voyageurs occidentaux. Avec ses plages de sable fin agrémentées de cocotiers sur lesquelles des millions de touristes se sont (et continent) de se prélasser avec un verre de mojito rhum citron menthe, tout en fumant un Cohiba, le tout avec pour fond sonore de la salsa, cette danse chaude et populaire très typique de pays latinos qui le soir venu anime les rues touristiques de La Havane. Là, vous vous croyez dans le décors d'un des livres d'Esnest Emingway. D'ailleurs, au début des années 1930, le célèbre auteur américain fit de Cuba sa destination préférée au point d'y posséder une maison.


Cuba, de l'esclavage à l'indépendance :


Depuis la conquête espagnole de 1492, Cuba a toujours joué un rôle central dans les Amériques. En effet, de par sa position géographique sur le continent, l'île, servait de point de relais ou de ravitaillement pour les galions chargés d'or, d'émeraudes, d'épices et autres richesses naturelles extraites des sous-sols des autres territoires espagnols répartis sur le continent. Convoitée par les autres puissances coloniales au cours des siècles suivants, Cuba fut au cœur d'une rivalité entre les espagnols et les portugais dans un premier temps, puis, virent s'ajouter les Français et enfin les Anglais qui prendront La Havane en 1762 et l'occuperont durant 11 mois( En 1793, les Espagnols récupérèrent Cuba, non sans sacrifice. Ils acceptèrent en contrepartie de céder la Floride aux Anglais). Ce sont d'ailleurs les Britanniques qui furent à l'origine de la transformation de la ville portuaire et qui firent de Cuba, une destination majeure du commerce des esclaves originaires d'Afrique de l'Ouest. Finalement,ce sont les Espagnols qui s'imposèrent définitivement sur cette île de 110 860 km2. Durant quatre siècles,des millions d'esclaves africains furent déportés sur l'île de Cuba où ils étaient exploités jusqu'à l'os, travaillant jour et nuit dans les immenses champs de canne à sucre, de café, de cacao, d'indigo, de tabac, mais aussi dans les mines de cuivre et d'or. Cette main d'oeuvre servile permit à Cuba de devenir la colonie la plus riche de l'Empire colonial espagnol. Cependant, au cours de cette période, il y eut plusieurs révoltes marrons à Cuba ( 1533,1538, 1713, 1731, 1810, 1820, 1843, 1844.)



( Photo de José Marti )

L'esclavage est finalement aboli en 1886 à l'issue de la sanglante Première Guerre d'Indépendance de 1868-1878 au cours duquel, prirent part des milliers d'esclaves noirs. Néanmoins, après dix ans de violence, il se solda par un statut-quo entre les indépendantistes et les royalistes. Moins de trois décennies après le premier conflit, l'île est secouée par un nouveau soulèvement. Le déclenchement de cette seconde guerre d'indépendance revient au Parti Révolutionnaire Cubain fondé par l'écrivain et journaliste José Marti. Se joignirent à lui, Antonio et José Maceo chefs de la première guerre d'indépence qui s'étaient réfugiés sur l'île voisine de Saint-Domingue ( en actuelle République d'Haïti.) Forts de leurs succès militaires initiaux, les rebelles sont très vites dépassés par les troupes royalistes qui adoptent la stratégie de la division du territoire, l'Île est coupée en deux. L'objectif est d'empêcher les troupes rebelles de s'approvisionner en hommes, en munitions et autres denrées de premières nécessités. Entre temps, le gouverneur militaire espagnol, le général Valeriano Weyler réagit avec brutalité et proclame la loi martiale. Les hostilités tournent très vite en défaveur des Cubains indépendantistes. Le 19 mai 1895, José Marti trouve la mort sur le champs de bataille de Dos Rios à l'Est de l'île. José Maceo est à son tour tué le 5 Juillet 1896 à la bataille de Loma del Gato. Le 7 décembre de la même année, Antonio Maceo meurt à Punta Brava.



( photo d'Antonio Maceo)

Au cours du conflit, le général Weyler inspiré par les fermiers américains qui utilisaient le barbé pour parquer leurs bovins dans de vastes enclos situés dans les Grandes Plaines, il créé la toute première version des camps de concentration, où sont acheminés des milliers de civils, femmes, enfants, vieillards. Les hommes en âge de combattre furent incorporés de force dans l'armée royaliste. Ceux qui refusaient, étaient tout simplement exécutés. En novembre 1897, confronté à un conflit sans issue, Madrid propose l'autonomie sa plus précieuse colonie, sauf que l'offre fut rejetée à la fois par les rebelles et les loyalistes, chacun campe sur ses positions. Sur le terrain, les combats se poursuivirent et tournèrent à l'avantage des loyalistes.Sans soutien militaire extérieur, les indépendantistes opérèrent une véritable stratégie médiatique afin d'alerté l'opinion internationale mais surtout américaine. L'objectif était d'interpeller le grand voisin américain. Premier conflit médiatisé du début du XXe siècle, la Guerre d'Indépendance cubaine fit les choux gras de la presse américaine de l'époque. Plusieurs magnats de la presse à l'image de William Randolph Hearst, Joseph Pulitzer, s'emparèrent du sujet et envoyèrent sur place des correspondants " de guerre" couvrir le conflit. Cela inaugura une nouvelle page de l'histoire des médias, avec l'apparition du photojournalisme et du journalisme sensationnel. A Washington, le président William McKinley pressé d'intervenir mais bloqué par le Congrès décida d'envoyer vers Cuba le cuirassé Maine en " visite d'amitié " à La Havane, mais en réalité le gouvernement américain désirait protéger ses ressortissants au cas où les révolutionnaires cubains prendraient le contrôle de l’île. Dans la soirée du 15 février, une mystérieuse explosion détruisit le cuirassé ancré en rade de La Havane, tuant 260 hommes. Un motif pour Washington d'intervenir militairement dans ce conflit qui était considéré à l'époque comme une " simple guerre civile" entre espagnols.




L’escadre de Cuba est coulée devant Santiago, le 3 juillet. Acculé, sans flotte, le Royaume d'Espagne capitula. Le conflit se solda par la mort 500 000 personnes en grande majorité des civils ainsi que par la signature du Traité de Paris le 10 décembre 1898. L’Espagne cédait non seulement Cuba, mais Porto Rico, les Philippines et l’île de Guam, et recevait une indemnité de 20 millions de dollars (pour la «vente» des Philippines). Porto Rico, les Philippines et Guam devinrent des colonies américaines; alors qu'au même moment, les Américains avaient réussi à annexer Hawaï. Ainsi, prenait fin l’empire colonial espagnol et débuta l'impérialisme des Etats-Unis.

De l'indépendance au Communisme :


Cuba obtint une indépendance théorique en 1902 avec une Constitution, de fait, l'archipel hispanophone devint en fait un protectorat américain. L'Amendement Platt, du nom du Sénateur Orville Hitchcock Platt, les Etats-Unis étaient autorisés à intervenir dans les affaires du pays et pouvaient installer deux bases navales à Cuba ( Guantànamo et à Bahia Honda) en contrepartie de privilèges douaniers. Ainsi, selon un accord conclu avec le gouvernement cubain en 1903, les USA obtinrent le droit de maintenir une base navale dans la Baie de Guantànamo, qu'ils continuent d'occuper encore aujourd'hui malgré les relations tendues avec l'actuel Gouvernement de l'archipel. Au cours de cette période, la vie politique cubaine fut très animée. Plusieurs régimes autoritaires pro-américains se succédèrent ( 1924-1933 Gerardo Machado), ( régime militaire pro-américain 1933-1940), ponctué par une courte alternance démocratique ( Carlos Manuel de Cespedes y Quesada Août 1933-Septembre 1933) avant que la dictature ne reprenne sa place dans le paysage politique cubain, en la personne de Fulgencio Baptista ( 1940-1944- 1952-1959). Alors que le pays politique politiquement cubain était mouvementé la vie économique elle, était très active.


Durant la première partie du XXe siècle, Cuba connu une croissance économique sans précédent, bien qu'un pan de son industrie et de son agriculture appartenait aux américains qui d'ailleurs administrèrent l'archipel hispanophone jusqu'en 1909. Cette période de prospérité ne profita pas à tous. Dans les campagnes, la pauvreté était extrême, le travail des champs était similaire à de l'esclavage. Le fossé entre les ouvriers agricoles et la classe bourgeoise principalement citadine et éduquée, se creusa. A plusieurs reprises, les ouvriers agricoles se révoltèrent pour dénoncer les conditions de travail et à chaque fois, la répression était brutale ( en 1912, face à une révolte des ouvriers agricoles, l'armée des Etats-Unis fit son grand retour à Cuba, la répression fit plusieurs milliers de morts.)


( photo du président Machado)

A la fin des années 1920 début 1930, Cuba devint un lieu de villégiature pour des millions de touristes nord-américains qui fuyaient chaque année l'hiver pour les plages cubaines. Cuba devint une destination touristique populaire grâce au romancier américain Ernest Hemingway, qui depuis 1932, avait ses habitudes. Toutefois, Hemingway n'était pas le seul à apprécier les charmes qu'offraient l'archipel du nord de la Caraïbe. Tout au long de cette période, Cuba devint le paradis des mafieux nord-américains. De grandes figures de la pègre italo-américaine, tels que Meyer Lansky, Lucky Luciano, Sam Giancana y séjournaient quasi à l'année et, ils profitaient des largesses des différents gouvernements pour mener leurs activités illicites en toute impunité ( trafic d'alcool, prostitution, jeux d'argent et trafic de stupéfiants, hôtellerie). Les liens entre la mafia et les politiciens cubains étaient très forts. A plusieurs reprise, la pieuvre finança des campagnes électorales pour différents partis politiques et participa à la construction de plusieurs grands bâtiments et hôtels dans La Havane.


La période des réformes et du grand nettoyage :


( Fidel Castro lors de son arrestation en 1953)

Ainsi, argent sale, corruption et répression rythmaient la vie politique et sociale à Cuba jusqu'en 1953 où un jeune avocat populaire du nom de Fidel Castro fruit de l'union charnelle entre un riche planteur espagnol et une cubaine afro-descendante, en opposition avec l'idéologie capitalise du dictateur Fulgencio Batista, organise un premier coup d'Etat le 26 Juin 1953 qui fut un échec sanglant. L'avocat et plusieurs de ses compagnons furent arrêtés, emprisonnés et certains exécutés. Durant deux ans, plusieurs manifestations, toutes violemment réprimées forcèrent finalement le président Baptista a libéré Fidel Castro qui fut contraint à l'exil au Mexique. C'est dans ce pays, qu'il prit la tête d'une armée rebelle en 1956, accompagné de son frère Raùl et d'un médecin argentin, un certain Ernesto Guevara dit Che Guevara qui était de voyage dans le pays. Dans son exil à Mexico, il fonda le Mouvement du 26 Juillet qui regroupait les survivants de la Caserne de la Moncada. La troupe faite de 82 hommes s'organisa et se forma militairement dans l'optique de renverser le dictateur et son gouvernement corrompu. La petite troupe embarquée sur le Granma débarqua clandestinement à Cuba, sauf que sur place, l'armée de Batista les attendait déjà. Sur les 82 hommes engagés seuls 16 survécurent. Ils se réfugièrent tous dans la Sierra Maestra d'où il menèrent des opérations de guérilla contre l'armée cubaine soutenue par le gouvernement des Etats-Unis qui lui fournit argent armes et conseillers militaires. Les rebelles furent rejoints par des milliers de paysans de la Sierra Maestra et d'ouvriers qui réclamaient du changement.


( photo de Fulgencio Batista)

Après six ans de lutte politique dont quatre ans de conflit armé, les rebelles cubains avec à leur tête Fidel Castro renversèrent Fulgencio Batista (qui se réfugia en République Dominicaine dirigée par le dictateur Rafael Trujillo puis, en Espagne de Franco). Le jeune leader charismatique devenu populaire à la fois à Cuba mais aussi aux Etats-Unis grâce aux médias américains apparu comme " le héros de la démocratie ". Ce dernier, accéda au pouvoir en tant que Ministre de la Défense puis, Premier Ministre. Les États-Unis furent en 1959, l'une des premières nations à reconnaître diplomatiquement le nouveau gouvernement, à la tête duquel, Castro Premier Ministre, avait pour mission de préparer les élections démocratiques dans les 18 mois et mettre en place des réformes économiques et sociales, malgré l'opposition croissante des Etats-Unis qui voyaient d'un mauvais œil, les réformes nationalistes portées par le jeune révolutionnaire. Malgré la menace et les intimidations américaines, Fidel appliqua son programme de nationalisation des terres agricoles aux mains des grandes compagnies américaines (environs 40%), de l'industrie détenue elle aussi par les entreprises américaines. Autre programme révolutionnaire, l'accès à l'éducation qui est désormais gratuite ou encore, augmentation des salaires et création d'une couverture médicale universelle gratuite pour tous les cubains. Les médias furent eux-aussi nationalisés. Des comités de défense de la révolution se mirent en place pour transformer le peuple cubain en acteur de la révolution,selon les partisans du régime ou pour surveiller et endoctriner la population, selon les opposants du régime.


( Fidel Castro à son

arrivée à La Havane en 1959)

De plus, toutes les formes de ségrégations raciales qui prévalaient à Cuba dans l'accès aux emplois, plages, parcs ou centres de loisirs furent interdites. Par ailleurs, les biens de la mafia devenue très puissante sous le régime de Batista, furent nationalisés. Seule ombre au tableau, la peine de mort abolie pour les civils à Cuba par la Constitution de 1940, est rétablie et progressivement étendue aux personnes qui commettraient des « délits contre-révolutionnaires » et des « actes préjudiciables à l’économie nationale et au Trésor public ». . En véritable Robespierre, Fidel Castro réforme et tue tous ceux qui s'opposaient à la Révolution. Le Cuba des années 1960 est marqué par une forte répression politique. Dès les premiers mois de la Révolution, on répertoria 631 condamnations à mort et 70 000 incarcérations. L'année suivante, 10 000 personnes furent exécutées et 20 000 dissidents politiques furent emprisonnés.


Affrontement avec les Etats-Unis sous fond de communisme


Bien que n'étant pas encarté au Parti Communiste au commencement de sa lutte politique, Fidel Castro a toujours entretenu des liens forts avec le Parti. Entouré de communistes dans la Sierra Maestra, parmi lesquels son frère Raoul, Fidel comprit très vite que le Parti Communiste était l'organisation politique la mieux structurée ( Partido Socialista Popular) et la plus populaire, pour lutter contre régime de Baptista. Quand il accéda au pouvoir et qu'il entama ses réformes, plusieurs membres du Parti Communistes obtinrent des postes clés dans le nouveau gouvernement. Une relation qui évidemment déplaisait au grand voisin américain dont les nationalisations déplaisaient déjà.


Conséquence, en 1960, les Etats-Unis annoncèrent des sanctions économiques contre le nouveau régime en place. En parallèle de ces sanctions, Washington qui était à ce moment secoué par le Maccarthysme, la lutte contre le communisme et le début de la Guerre Froide, ne pouvait tolérer un potentiel régime communiste quelques kilomètre de ses côtes. Le président Général Dwight Eisenhower inaugura une nouvelle politique visant à éliminer le régime communiste à Cuba : annulation de la quote-part sucrière cubaine, embargo sur les livraisons de pétrole et autres matières premières, poursuite de l'embargo sur les armes imposé en Mars 1958 et, mise en place d'une campagne de terrorisme et de sabotage sur le territoire cubain. La même année, le président Général Dwight Eisenhower accorda une aide financière de 13 millions de $ US aux opposants cubains afin de créer un camp d'entrainement au Guatemala destiné à former des combattants anticastristes. Pour faire face aux conséquences économiques, Fidel Castro se rapprocha de l'Union Soviétique


Le jeune président John Fitzgerald Kennedy, nouvellement élu, non informé de l'opération, prit au dépourvu ne pu qu'accepter la mission. C'est ainsi qu'en Avril 1961, une équipe de dissidents composée de 1400 réfugiés cubains recrutés et entraînés par la CIA. Malgré une bonne préparation, le Débarquement de la Baie des Cochons fut un échec cuisant pour la nouvelle administration américaine. En effet, ceux-ci comptaient sur un soulèvement de la population pour faire basculer la situation, mais celle-ci n'eut jamais lieu. En réponse à cette attaque, Cuba déclara son région socialiste. La même année, les Etats-Unis rompirent toutes les relations diplomatiques avec Cuba ( leurs intérêts sont alors défendus par l'ambassade de Suisse présente à La Havane, tandis que l'ambassade de Tchécoslovaquie défendait ceux des cubains à Washington). Le 23 Février 1962, Washington décréta l'embargo commercial contre l'île ( qui perdue en réaction aux mesures de nationalisation opérées les années précédentes. Suite à cela, Cuba se détourna définitivement des Etats-Unis pour se rapprocher de l'Union Soviétique et des autres pays socialistes en place à cette époque.


( Fidel Castro à Moscou avec Nikita Khrushchev en 1962 )


( La suite au prochain épisode )

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