Affaire Michel Zecler : les policiers mis en liberté
- ELMS
- 22 déc. 2020
- 4 min de lecture
L'affaire Zecler, du nom du producteur de musique passé à tabac par des policiers, prend une nouvelle tournure. Deux des policiers incriminés dans ces violences volontaires ont été remis en liberté mais placés sous contrôle judiciaire. Néanmoins, les deux agents ne pourront plus exercer la profession de fonctionnaire de police, ni posséder une arme. Il leur est par ailleurs interdit d'entrer en contact avec leur victime et de paraître dans le 17e arrondissement.

Souvenez vous, Michel Zecler producteur de musique d'origine martiniquaise et propriétaire du label Black Gold Corp Studios était devant l'entrée de sa structure quand il aperçoit une patrouille de police qui faisait sa ronde dans le quartier. Ne portant pas de masque, l'homme décide d'entrer dans les locaux de son studio. C'est là que les choses dérapent.
Comme l'a affirmé Michel, les forces de l’ordre sont entrées après lui. Sans dire un mot, des mains le tirent en arrière. Les policiers tentent de le faire sortir de son studio d'enregistrement. Durant 15 minutes l'équipage de police assène des coups violents au producteur de musique, qui ne comprend pas ce qu'on lui reproche. Il reçoit au total une vingtaine de coups de poing, une dizaine de coups de pieds et plus d’une quinzaine de coups de matraque. Les coups sont suivis d'insultes à caractère raciste comme " Sale nègre " " Ta gueule sale nègre", proférés à plusieurs reprises par les agents qui eux contestent les dires.
Michel fait attention à ne faire aucun geste brusque. N'étant pas seul à ce moment, il crie et appelle à l'aide. Ses cris finissent par se faire entendre. Neuf artistes qui enregistraient quelques titres au sous-sol, sortent pour venir en aide à leur producteur. Les policiers sont repoussés dehors, puis tentent à nouveau de rentrer en brisant la vitrine et cognent avec violence sur la porte en ordonnant à Michel et à ses artistes de sortir. Entre temps, des renforts sont appelés. A l'extérieur, les voisins armés de leurs téléphones filment la scène. On y voit les policiers, armes à la main pointée en direction de la porte du studio. Pour les faire sortir, les policiers utilisent une grenade lacrymogène à l'intérieur du local.
Asphyxié, Michel sort de son studio. C'est alors qu'il reçoit de nouveau une salve de coup de la part des forces de l'ordre, qui pénètrent armés dans la structure pour délogés les neufs artistes qui, entre temps s'étaient réfugiés dans les sous-sols du fait des émanations de gaz. Placés au sol, ils reçoivent tous des coups et des insultes.
Selon leur procès-verbal consulté par l'AFP, les policiers ont tenté d'interpeller le producteur pour défaut de port du masque. "Alors que nous tentons de l'intercepter, il nous entraîne de force dans le bâtiment", écrivent-ils. Sur les images de vidéosurveillance de ce studio, on voit les trois fonctionnaires de police entrer dans le studio en agrippant l'homme puis le frapper à coups de poing, de pied ou de matraque.
Les policiers contestent avoir suivi le producteur dans son studio de musique du XVIIe. Ils disent avoir préalablement saisi son bras dans la rue en lui intimant de s'arrêter et en déclinant leur qualité. Mais Michel Zecler serait rentré de force par la porte de son studio sans faire usage d'une clé ou d'un code et les aurait entraînés à l'intérieur. Les fonctionnaires prétendent qu'ils n'avaient pas conscience qu'ils pénétraient dans un local privé, pensant qu'il s'agissait du hall public d'un immeuble. Au sujet des insultes, les policiers ont démenti devant les enquêteurs avoir traité de « sale nègre » la victime, comme celle-ci l'a soutenu. Une nouvelle vague d'auditions de témoins et d'exploitations vidéos doit être menée par l'IGPN dans le cadre de l'instruction ouverte.
Deux des policiers incriminés mis en liberté :
La nouvelle est donc tombée dans la journée. Les juges d’instruction ont ordonné mardi 22 décembre la mise en liberté des deux policiers placés en détention depuis le 30 novembre . On sait par ailleurs que les deux policiers ont été interrogés par les magistrats instructeurs les 18 et 21 décembre. À l'issue de leur interrogatoire, ils ont formulé une demande de mise en liberté. Le parquet de Paris ne s'y est pas opposé tout en demandant un placement sous contrôle judiciaire strict.
Les magistrats ont ainsi ordonné la remise en liberté des deux policiers ce mardi. Ils ont été placés sous contrôle judiciaire avec interdiction d'entrer en relation avec la victime et les autres mis en examen. Il leur est également interdit de paraître dans le 17ème arrondissement de Paris, d'exercer la profession de fonctionnaire de police et de détenir une arme. Les deux agents ont aussi l'obligation de fournir un cautionnement de 5 000 euros.
Cette décision donne encore une fois un sentiment d'impunité voire d'injustice, avec un pouvoir régalien du côté des hommes en uniforme, car, une grande majorité de ces affaires, dénoncées par des associations, des journalistes ou par les familles des victimes n'aboutissent pas ou sont classées sans suite. Si ce n'est que le ou les policiers incriminés soient relaxés ou encore que l'affaire traine durant des années sans qu'elle n'aboutisse.
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