Pendant plusieurs décennies, aux Antilles-Françaises, la presse locale a longtemps été dominée par le France-Antilles. Voix officielle de la République, le journal créé par le Général De Gaulle rythmait la vie des guadeloupéens et des martiniquais. Cinquante ans après, le plus grand quotidien des deux îles n'est plus que l'ombre de lui-même. A l'image du monde, les antillais sont beaucoup moins friands de lecture.
Pendant cinquante ans, les Antilles-Françaises ont vécu au rythme d'un quotidien, le France-Antilles. Avec environ 35000 exemplaires vendus quotidiennement à la Martinique et 25 000 en Guadeloupe, France-Antilles reste encore le journal le plus lu des deux îles. En situation de quasi-monopole durant ces cinquante dernières années, le journal était vu comme la voix officielle du gouvernement français.
Journal aux titres racoleurs, limite polémiques, misant sur les Faits-divers ou le sport local, France-Antilles se veut être avant tout un journal de proximité. Relatant les derniers événements relatifs aux événements de la société antillais. Cependant, malgré une censure apparente, le journal s'est imposé dans le quotidien des antillais. Dans les boulangeries, au supermarché ou dans les petites boutiques, le France-Antilles est omniprésent. Acheter le journal local, est un geste qui rythme la vie des guadeloupéens et des martiniquais, notamment les personnes les plus âgées, qui ont grandit avec.
Une histoire de la presse française :
Aujourd'hui, nous vivons à l'heure du tout numérique, du respect des principes de liberté d'expression, d'information et de circulation des hommes, des biens et des idées. Cependant, il y a cinquante ans, la presse était sous contrôle total du gouvernement via le puissant ministère de l'information. Cette mainmise étatique sur les médias remonte au tout début de la création de la Presse en France. En effet, selon la Maison des Journalistes :
" Dès le XVe siècle se multiplient les « occasionnels », pièces d’actualité de large diffusion sous forme de plaquettes ou de placards. De présentation stéréotypée, au discours formalisé, elles annoncent les grands événements comme les faits divers, avec un goût pour l’extraordinaire. C'est en 1631 qu'apparaissent les premiers périodiques d’information français, notamment la Gazette de Théophraste Renaudot. Pendant cette période, très encadrée par le pouvoir royal, la presse se développe lentement dans les sociétés de cour. Elle connaît avec « les Lumières » un premier essor, marqué par le premier quotidien d’information, le Journal de Paris en 1777.C’est avec la Révolution française et la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen, qu’est consacrée, le 24 août 1789, la libre communication des pensées et la liberté d’imprimer ses opinions. En 1791, l’Assemblée Constituante réglemente la liberté de la presse alors en plein essor, les journaux de toutes tendances prolifèrent, et le lectorat s’accroit. La censure se durcit toutefois sous la terreur, et se prolonge, de manière plus ou moins atténuée sous le Directoire et l’Empire, période qui voit s’effondrer le nombre de journaux autorisés. "
A partir du XIXe siècle, la France de la Belle Epoque, connaît un essor de la Presse, sans doute lié aux politiques d'alphabétisation entreprises par les différents gouvernements d'alors mais aussi grâce au développement de nouveaux moyens de diffusion que sont la radio. On parle de la " civilisation de journal ". Le développement des mass médias est aussi lié aux évolutions institutionnelles. Ainsi, la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, permet aux journaux d’acquérir une place prépondérante dans la vie des français entre 1881 et 1914. […] Les principaux journaux se dotent d’un appareil complet incluant imprimerie, portage, transmission, correspondants. Le journal s’adresse désormais à toutes les classes sociales. Il propose jeux ou feuilletons et couvre les faits divers. La presse est devenue le « quatrième pouvoir » redouté des politiques.
Pourtant, au cours des deux grandes Guerres Mondiales ( 1914-1918) ( 1939-1941), le milieu de la presse connaît de nouvelles contraintes, parmi lesquelles, main-d’oeuvre mobilisée, pénurie de papier mais surtout, de nouveau : la Censure. En effet, comme le notre la Maison des Journalistes : " Le ministère de la Guerre impose un contrôle préalable et prend des sanctions, voire interdit des titres. Le refus de l’accès au front aux agences et aux photographes amène enfin une pénurie d’images. Cette censure se double d’une participation de la presse à la propagande, le « bourrage de crâne », qui jette un discrédit durable sur la profession. " Les ventes s'écroulent, le peuple n'a plus confiance dans la presse.
Au cours de la Seconde Guerre Mondiale, plusieurs organes de presse ont collaboré avec l'occupant Nazi. Ce qui jeta le discrédit sur la profession. Ainsi, la quasi-totalité des grands-titres disparaissent. Les journalistes qui refusaient de collaborer étaient tout simplement déportés vers les camps de concentration en Pologne ou en Allemagne. A la solde de l'Allemagne et du gouvernement de Vichy, une nouvelle fois, le fossé se creuse entre le peuple et les journaux.
A la libération, en 1944, et lorsque la guerre prend fin en 1945, la presse reprend la place qu'elle occupait dans le coeur des français. Plusieurs organes de presse font leur apparition," L’Express et l’Indochine, France Observateur et Témoignage chrétien et l’Algérie. " L'heure est à la libéralisation de la presse et de la parole. Ce " boom " médiatique entraîne dans son sillage l'avènement des journalistes, chroniqueurs ou éditorialistes stars. On parle de Pierre Lazareff et Hubert Beuve-Méry, ou de nouveaux venus tels Françoise Giroud ou Raymond Aron. La presse connaît une évolution dans les années 1960, avec l'apparition des premiers reportages sociaux, politiques...
Bien qu'en plein essor,elle reste très surveillée par le pouvoir politique. Dans sa série d'articles sur l'Histoire des médias sous contrôle : Mediapart écrit :
« Dans les mois et années qui suivent la Libération, l'utilisation de la radio comme porte-voix du gouvernement français est largement assumée par le personnel politique. Son directeur, l'ancien résistant socialiste Jean Guignette, déclare ainsi en décembre 1944 que « la radio est une arme d'action, de persuasion, de prestige. Et cela lui impose le devoir de chercher systématiquement la qualité, la cohérence, l'unité sans fissure des doctrines et des formules de ralliement »
Le contrôle de la presse entre dans un contexte géopolitique particulier. La France ravagée de la Seconde Guerre Mondiale, libérée par les alliés, intègre le camp Occidental dans le contexte de la Guerre Froide. Tous journalistes aux tendances socialistes ou communistes sont écartés des micros, des caméras ou des machines à écrire. Toute critique est censurée, par le pouvoir. Dès lors, la presse devient la voix des gouvernements de l'époque.
Il est vrai qu'en 1959, une des première réformes du gouvernement gaulliste sera de sortir la radio et la télévision du giron de l'administration, en l'organisant comme d'autres services publics sous la forme d'un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC). Toutefois, le contrôle politique demeure puisque le directeur général et les membres représentant l'État au Conseil d'administration sont soumis au pouvoir discrétionnaire de l'exécutif. Pour le Général De Gaulle, qui comprend parfaitement le pouvoir de « la petite lucarne », la télévision doit notamment servir à répondre aux critiques assénées par l'opposition, et la réorganisation de l'audiovisuel public en 1964 avec la création de l'Office de Radiodiffusion Télévision française (ORTF) n'apporte aucune avancée du point de vue de la liberté de communication. Quant aux premières tentatives de libéralisation souhaitée par le Premier ministre Jacques Chaban Delmas, elles sont vite démenties par Georges Pompidou, qui rappelle que « l'ORTF, c'est la voix de la France »
Il faudra attendra la loi du 29 juillet 1982 promise par François Mitterrand lors de la campagne présidentielle pour que la télévision, la radio et la presse écrite soient partiellement libérées de la mainmise étatique. Plusieurs organes de presse privés apparaissent.
Une surveillance étatique sur la presse antillaise :
Dès le début de la colonisation, s'est développée en quelque sorte des organes de presse, pour relater la vie dans la colonie. On le sait, dès la fin du XVIIIe siècle, la presse en Guadeloupe accompagne et illustre la vie des habitants de l’île à travers les textes, les dessins, les caricatures plus tard les photographies et contribue à faire connaître les textes officiels, les événements qui marquent l'histoire de l'île. Plusieurs journaux firent leur apparition à différentes époques.
D’abord paraissent Follicules caraïbes en 1785, le Calendrier et l’Almanach de la Guadeloupe (1792). Au XIXe siècle L’Annuaire de la Guadeloupe, la Gazette de la Guadeloupe, la Gazette officielle, (1815-1881), Le Journal officiel de la Guadeloupe, (1882-1947) présentent les textes officiels. C’est à cette période que la presse locale prend son essor et devient l’organe d’expression de l’actualité, l’histoire, la politique, la culture guadeloupéenne avec Le Journal de Pointe-à-Pitre, Le Commercial, Le Courrier de Guadeloupe, Le Progrès, Le Peuple. Au XXe siècle, Aldophe-Hildever Lara fonde Le Nouvelliste de la Guadeloupe (1902-1965), premier journal dédié à l’information. Après la Seconde Guerre mondiale apparaissent La Revue guadeloupéenne (1944 1962), Clartés (1945-1974), Le Miroir de la Guadeloupe (1947-1957), Match (194362010), L’Etincelle (1944), Le Progrès social (1957). Le quotidien Le Nouvelliste est suivi par Antilles matin (1964-1966),
Dans le contexte de la Guerre Froide, de la Révolution Cubaine et des indépendances des îles anglophones limitrophes, les anciennes colonies de Guadeloupe et de la Martinique, sont elles aussi secouées par les vents autonomistes voire indépendantistes. Les deux anciennes colonies désormais départements sont encore très pauvres. Les inégalités sociales et raciales sont encore très criantes. Après la ferveur de la départementalisation, la déception est grande. Le chômage, l'illettrisme et la pauvreté sont les grands maux de la société antillaise post-coloniale. Nombreux sont ceux qui, à l'époque parlent de l'indépendance totale. Des thèses qui gagnent rapidement la population, par le biais de journaux de gauche, orientés vers le Marxisme. De plus, le paysage politique est largement dominé par des élus communistes, Gerty Archimède en Guadeloupe ou Aimé Césaire à la Martinique font peur aux autorités françaises qui, voient en ces élus, le " péril rouge. "
Ce contexte social est marqué par de nombreuses émeutes sévèrement réprimées dans le sang. Face à la montée des " rouges" dans son pré carré caribéen, la France doit réaffirmer sa force. Ainsi, c’est à l’occasion d’une visite officielle à la Martinique du président de la République Charles de Gaulle que sort le premier numéro de France-Antilles, le mardi 24 mars 1964, afin de relater sur quatre pages les temps forts de la visite du général, ses discours, ainsi que le grandes œuvres de développement réalisées par la France dans l'île. Ce journal, qui n'est encore qu'un mensuel, devient quotidien en septembre 1964, puis est également diffusé en Guadeloupe en 1965. L’Etat finance avec des deniers publics le lancement de France-Antilles, en installant une imprimerie à Fort-de-France.
En créant un journal dominant pour la zone des Antilles, la stratégie du Gouvernement de l'époque était à la fois politique. France-Antilles a ainsi participé à l'écrasante victoire du Général De Gaulle lors des élections présidentielles de 1965. Alors qu'en France, le Général ne recueillait que 55% des voix, à la Martinique, il est sortit vainqueur à 86% des voix et en Guadeloupe, il obtient un score stalinien de 90% des suffrages exprimés. Au delà de l'aspect politique, France-Antilles devait également jouer un rôle géopolitique. Il fallait asseoir le pouvoir de la France, dans ces îles et plus largement dans cet Outremer situé dans une zone en effervescence. Ainsi, les titres, les articles sont très orientés en faveur du gouvernement en place. Par exemple, en Mai 1967, la violente répression des forces de l'ordre à l'encontre des ouvriers du bâtiment a été complètement atténuée par la rédaction. Journal de propagande ou journal d'information, la frontière a été mince.
En 1973, Robert Hersant, patron du groupe Socpresse ( Le Figaro, France-Soir ) rachète le journal. Jusqu'à ce jour, le montant est inconnu. Grâce à ses liens étroits avec le milieu politique de droite, cet ancien collaborateur de l'Allemagne nazie s'est imposé comme le plus grand vendeur de journaux des Antilles et plus largement de l'Outremer français. En effet, le groupe France-Antilles qui détient celui de Guadeloupe et de Martinique, est enraciné dans les territoires d'Outremer. Il réunit sept quotidiens aux Antilles (France-Antilles Guadeloupe, France-Antilles Martinique et France-Guyane), à La Réunion (Le Journal de l’île de la Réunion), en Polynésie française (La Dépêche de Tahiti et Les Nouvelles de Tahiti) et en Nouvelle-Calédonie (Les Nouvelles calédoniennes), le plus souvent en situation de monopole qui a pendant longtemps favorisé la prépondérance de la France. La politique éditoriale est annoncée dès le titre, France-Antilles parle alors essentiellement de la France et des Antilles. Priorité donc aux actualités de l’île ou des départements ultra-marins (les petites Antilles) et celles de la métropole (la France), l’actualité internationale ou plus largement régionale étant réduite à quelques dépêches ou moutures.
Installée dans des îles où les habitants parlent créole, la rédaction des journaux se fait en français, langue nationale et officielle, langue d’administration, de culture et d’échange. Il n’est fait aucune place au créole. Il faudra attendre les années 2000 pour qu'enfin le créole fasse son apparition et encore seulement dans les gros titres.
La période de la libéralisation de la Presse :
L'arrivée de François Mitterrand à la présidence en 1981 a marqué un tournant pour la profession, aussi bien en France qu'en Outremer. Dès la première année de son mandat Mitterrand fait voter la loi de 1982 relative à la communication audiovisuelle sur la libéralisation de la Presse, mettant fin à la domination étatique sur l'opinion publique. Cependant, il faudra attendre 1985 pour que la CINQ ( France 5), première chaîne française généraliste commerciale privée et gratuite soit créée. Elle commencera à émettre le jeudi 20 février 1986, quelques mois avant les élections législatives de la même année. Cette loi entraîne de profonds bouleversements au sein du paysage médiatique national puisque des radios, des chaînes de télévision privées apparaissent. Au niveau des journaux papiers bien qu'ils aient été officiellement libres, la parole se libère, la critique fait son grand retour et les journalistes sont moins surveillés. Ces changements sont visibles dans la façon de consommer l'information.
Le public se cantonnait au journal papier, ou à l'unique station radio officielle. Désormais, il a le choix entre les trois canaux de diffusion. Néanmoins, la presse écrite, longtemps dominante connaît un premier coup dur. Elle perd son monopole au profit de la télévision. Ces mutations entraînent une chute des ventes de journaux. Le public préférant regarder le journal Télévisé ou écouter celui diffusé à la radio.
Les Antilles-Françaises ne sont pas en reste. Elles aussi voient un changement de comportement du public, qui comme leurs compatriotes de l'Hexagone se tournent vers la radio ou la télévision. Dès 1962, apparaît à la Martinique RCI, radio privée de proximité, tournée vers la Caraïbe. Au départ, radio pirate diffusant des programmes musicaux des Antilles-Françaises et des îles environnantes. Malgré les nombreux obstacles, elle s'est imposée dans la vies des guadeloupéens et des martiniquais, au point de devenir la radio la plus écoutée des Antilles-Françaises.
C'est d'ailleurs en 1986 qu'apparaît Canal 10 chaîne de télévision généraliste privée de proximité consacré à la vie locale et aux réalités sociales, économiques et culturelles de la Guadeloupe. En Martinique, c'est à partir des années 1990 que des chaînes de télévision privées font leur apparition ( ATV, KMT). A la différent des médias traditionnels pro-gouvernementaux, ces nouveaux médias n'hésitent pas à donner la parole à la population qui fut pendant longtemps, spectatrice des informations. De plus ces chaînes n'hésitent pas à diffuser leurs programmes dans les deux langues, français et créole, ce qui marque encore une fois la différence avec France-Antilles.
Malgré la forte influence des médias télévisés ou radio-diffusés, la presse écrite a toujours son public. La libéralisation des années 1980, entraîne la création de plusieurs organes de presse, durant ces vingt dernières années. Sept magazine (1979-2010), La Gazette des Caraïbes (2006-2009), Nouvelles Semaine (2010), Le Courrier de Guadeloupe (2012), Ti Journal (2015).
Le web, avenir de la presse ?
L'un des plus grands bouleversements de notre société contemporaine a été l'apparition d'internet, à partir des années 1990. Le développement d’internet dans le paysage médiatique a fortement impacté les comportements des consommateurs. Contrairement à ce que l'on croit, ces changements ne sont pas uniquement locaux, mais, ils sont mondiaux. Finit le temps où l'on se rendait au kiosque ou à la boulangerie pour acheter son journal papier, maintenant l'actualité est disponible en un clic. L'ordinateur ou le Smartphone remplacent la télévision, les sites internet concurrencent la presse écrite où l’information est personnalisée
Dès 1998, plusieurs grands journaux, nationaux, internationaux sont passés au numérique.Ce développement vers le web été pensé comme une stratégie de positionnement sur l'Internet, car, de nos jours, la société moderne est beaucoup plus mobile. Les utilisateurs s’attendent à avoir accès à une gamme de services disponibles à la demande et en temps réel. Parmi ces services, l'accès à des contenus presse en temps et en heure, le tout en un clic. Le lecteur autrefois attaché au traditionnel journal, est devenu consommateur. On ne lit plus l'actualité, on la consomme.
L'avantage avec le tout numérique, le rendu des photos est de meilleure qualité sur tablette que sur papier, le partage de l’information avec son entourage est beaucoup plus facile, et pour aller rapidement à l’essentiel ou trouver une réponse à une question précise. L'essor de ce nouvel outil communicationnel a favorisé l'apparition du journalisme en ligne et le développement de nouvelles professions médiatiques que sont les blogueurs, les journalistes web, ou plus récemment les influenceurs. Par la même occasion, de nombreux sites d'actualité ont fait leur apparition, c'est le cas de Rue 89, Médiapart etc.
L'essor de ces nouveaux sites ou blogs d'actualité web a en partie entraîné le déclin de la presse écrite traditionnelle. Néanmoins, malgré le succès des presses en ligne, le web a également mis en péril une bonne part de la presse écrite. Beaucoup de journaux papiers autrefois prospères ont disparus au cours de cette décennie. D'autres, pour survivre ont opté pour le tout numérique avec possibilité d'abonnements ou d'articles payants. Si bien que l'on parle d'une crise de la presse écrite quotidienne.
La Guadeloupe et la Martinique ont elles aussi été touchées par ces évolutions. Les principaux journaux des deux îles ont suivi la tendance, avec la création de leurs sites web. RCI, France-Antilles, ATV et même la principale chaîne de télévision locale, Guadeloupe 1ère ont débarqué sur le web. Dans la foulée, de nouveaux sites d'actualité sont apparus, avec chacun une ligne éditoriale précise. Peu à peu, les antillais délaissent le traditionnel journal papier au profit de l'article en ligne. Ce qui a occasionné une baisse des ventes du France-Antilles. Bien qu'il soit encore en situation de monopole, le journal qui est toujours au main de la famille Hersant, est en crise. A plusieurs reprises, l'entreprise a frôlé le dépôt de bilan. En 2014, France-Antilles Martinique a été placé en redressement judiciaire, suivi en 2015 par France-Antilles Guadeloupe. Un redressement qui a amené à des licenciements. Deux ans plus-tard, le quotidien antillais échappe une fois de plus au dépôt de bilan grâce à un plan de sauvegarde porté par Aude Jacques-Ruettard, (nièce de Philippe Hersant) et l'homme de médias, Philippe Labi, qui s'était engagé à maintenir l’effectif pendant deux ans et projette de faire un investissement immédiat de 8 millions d'euros pour la transformation de l'entreprise. Sauf que, l'entreprise médiatique est toujours dans la tourmente financière. Une procédure de sauvegarde a été sollicitée en Juin dernier. Pas de quoi soulager les employés, qui vivent dans l'angoisse d'une restructuration avec des licenciements à la clé.
Mauvais choix, une maîtrise tardive des outils industriels en Martinique et en Guadeloupe, mauvaise évaluation du marché publicitaire aux Antilles Guyane, manque de compétitivité, entretien des machines d'impression coûteux, impression quotidienne onéreuse, un virage numérique encore trop timide, concurrence des médias en ligne et un lectorat vieillissant, les raisons sont multiples. Pour autant, les 257 emplois restants sont menacés. Depuis 2014, le groupe s'est déjà séparé de près de 200 salariés.
Si France-Antilles venait à fermer, c'est comme si un pan de la culture antillaise allait disparaître. A moins qu'un nouveau média relayant l'actualité des trois collectivités d'Outremer n'apparaisse. En attendant, l'avenir de la presse aux Antilles-Guyane a encore de beaux jours devant lui. Selon les récents chiffres de médiamétrie, relayés par nos confrères d'Outremer360, aux Antilles, 67,3% de la population de 15 ans et plus a consulté au moins une marque de Presse en version papier ou numérique au cours du dernier mois, soit 423 800 individus. En Guyane, où la population est plus jeune (45,4% de la population a moins de 35 ans contre 26,1% aux Antilles), la presse séduit plus d’un Guyanais sur deux (52,1%).La presse papier a ses adeptes, notamment aux Antilles, où de la population a consulté une marque de presse en version papier lors des 30 derniers jours, soit 372 400 individus de 15 ans et plus. La presse est notamment consultée par 81,4% des CSP+ ( actifs) Antillais et par 73,7% des Guyanais, aussi bien sur les versions papiers que numériques. Les femmes se démarquent également par leur utilisation de ce média : 66,2% des Antillo-guyanaises ont été en contact avec une version papier ou numérique du média Presse au cours des 30 derniers jours.
En se digitalisant, la presse s’adapte aux nouveaux usages de consommation média. Cette montée en puissance de la Presse en ligne vient compléter le print et toucher de nouveaux lecteurs, dont les usages sont principalement numériques. Ainsi, 28,1% des Antillo-guyanais de 15 ans et plus ont consulté au moins une fois une marque de Presse sur Internet au cours du dernier mois, soit 230 400 individus. Cette tendance est particulièrement visible en Guyane, où 31,8% de la population a consulté la version numérique d’une marque de presse lors des 30 derniers jours.