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HENRI CORENTHIN : UN GUADELOUPEEN VISIONNAIRE


S'il y avait un nom à retenir,c'est celui d'Henri Corenthin. Ce nom ne vous dis rien ? Pourtant Henri Corenthin aura de son vivant marqué son époque. Décédé le 17 Avril dernier à l'âge de 92 ans, Henri Corenthin faisait partit de ces caribéens qui dans les années 60 se sont investis dans les indépendances des jeunes nations africaines. Guadeloupéen à l'aura international, il mourut pourtant dans l'anonymat, vénéré par l'ancienne génération et méconnu de la jeunesse.

Le Dr Henri Corenthin, décédé le 17 Avril dernier à l'âge de 92 ans, laisse le monde politique guadeloupéen en deuil. Guadeloupéen à l'aura international, le Dr Henri Corenthin aura joué de son vivant, un rôle clé dans la vague de décolonisation des jeunes nations africaines. Vénéré par les anciens méconnu par les plus jeunes, il prit la décision d’œuvrer en Afrique notamment au Mali où il devint Ministre Ministre des Transports, des Travaux Publics et des Télécommunications pour la République du Mali en 1960.

Né en 1923 en Guadeloupe, Henri Corenthin quitte son île natale pour Montpellier afin de suivre des études de médecine. En entre temps, en 1946, alors qu'il n'a que 21 ans, il s'engage dans la marine nationale. Libre d'esprit, il n'hésita pas à montrer son hostilité vis à vis de la politique coloniale française aux Antilles et à critiquer la mise en place de lois dites d'assimilation suite à la départementalisation qui touchait la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane et la Réunion.

« Je ne serai jamais assimilé à un francais » avait-il déclaré à l'époque.

Une fois ses études de médecine et son service militaire terminés, Henri Corenthin arrive au Soudan français (actuel Mali) dans le cadre de la coopération française. Il est nommé médecin du cercle de Kita dans la région de Kayes à 185 kilomètres de Bamako. Très vite il s'implique dans la vie sociale, sportive, culturelle et politique du pays, s'engage dans le syndicalisme, puis devient secrétaire de l’Union des travailleurs de santé (UTS). L'homme adhère à l’Union soudanaise-Rassemblement démocratique africain (US-RDA) dont le leader est Modibo Keïta.

De ses déclarations, nous retiendrons celle-ci : " « convaincu que le Guadeloupéen que je suis et qui avait grandi dans une Guadeloupe éprise de « patriotisme francais » devait radicalement dévier de cette voie et concevoir que la communauté guadeloupéenne n’était pas assimilable à la communauté française (…), j’avais pris la décision de me battre contre le colonialisme francais et de participer dans la grande organisation qui se mettait en place, sous l’égide du RDA [ndlr. Rassemblement démocratique africain], le mouvement d’émancipation de l’Afrique noire ».

En 1957, Henri Corenthin entre dans le premier gouvernement de la loi-cadre comme ministre chargé de l'Elevage et de l’Industrie animale. Poste qu'il occupe jusqu'en 1959 à la création de la Fédération du Mali. Il devient membre du bureau politique de l’Union soudanaise-Rassemblement démocratique puis secrétaire politique de la section jeunesse de l’organisation. Ce parti politique mène le Soudan français vers l’indépendance proclamée en 1960 par Modibo Keïta après l'éclatement de la Fédération du Mali, regroupant le Sénégal et le Soudan français, qui devient la République du Mali. Modibo Keïta en devient le premier président. Henri Corenthin est nommé, ministre des Travaux publics, des Transports et des Télécommunications à 36 ans.

Proche du président Keïta, en 1962, il fait partie de la délégation malienne qui négocie les rapports de coopération avec l'Etat français.Mais l’engagement du Guadeloupéen qualifié de « révolutionnaire excité » irrite l’Etat français et particulièrement Jacques Foccart. Sa nationalité française lui sera retirée.

Cela n'empêchera pas Henri Corenthin continue de travailler pour le gouvernement Malien. Le 19 novembre 1968, au cours d'une mission au Mexique, Henri Corenthin apprend que le président Modibo Keïta a été renversé par un coup d’Etat dirigé par le colonel Moussa Traoré. De retour au Mali, le nouveau pouvoir lui propose de faire partie du gouvernement. Demande qui se solda par un refus, mais comme le rappel nos confrères de RFI, Henri Corenthin finit par accepté l'offre de Traoré mais finit par quitter le Mali pour retourner à Paris où il reprend ses études. Cette fois, il s'orient dans la néphrologie.

Une fois ses études terminées et son diplôme en poche, Henri Corenthin décide de rentrer dans son île la Guadeloupe, secouée par des tensions sociales. A l'époque, une croissance démographique et un fort chômage, entraînèrent de fortes tensions sociales, réprimées dans la brutalité par les forces coloniales françaises. Niveau personnel, il mène une bataille juridique, pour récupérer sa nationalité et sa réintégration à l'ordre des médecins pour enfin exercer. Ce n’est qu’en 1976 qu’il obtient de nouveau la nationalité française car jusqu'à cette époque il était considéré comme citoyen malien. De nouveau réinscrit à l’‘ordre des médecins français, en collaboration avec Guy Beaubois, l’un de ses confrères guadeloupéens, il sera médecin spécialisé de la clinique des « Eaux Vives » dans les hauteurs du Matouba.

Redevenu "Français", il s'engage en politique, il est un membre fondateur de l'Union populaire pour la libération de la Guadeloupe (UPLG), un parti politique qui milite pour l'indépendance de la Guadeloupe. Représentant de l'UPLG, il se rend à New York porteur d’une requête à l’attention de l’ONU pour informer les instances internationales de la situation de la Guadeloupe, colonie française depuis 1635...

En 1992, il se présente aux élections régionales sur la liste Alternative Gran Koudmen, un mouvement indépendantiste qui participe pour la première fois aux élections et obtient 5,49% de suffrages et deux sièges au Conseil régional.Henri Corenthin siègera au Conseil régional de Guadeloupe.

A la fin de son mandat, il se retire de la vie politique. En 2009, Henri Corenthin soutient activement le LKP (Lyannaj Kont Pwofitasyon), le collectif à l'origine du mouvement social qui avait mobilisé les Guadeloupéens durant 44 jours contre la cherté de la vie.

Mais Henri Corenthin n'aura pas seulement endeuillé le monde politique, grand sportif, Henri Corenthin est champion d'athlétisme, durant sa jeunesse. Il a gagné plusieurs compétitions tant en Guadeloupe qu'en France et au Maroc. En 1983, il organise « les Jeux de la Guadeloupe », une manifestation d'athlétisme réunissant des Caribéens et des stars mondiales. En 1988, lors de la 94e session du Comité international olympique (CIO) à Puerto Rico, il reçoit la médaille de l’ordre olympique des mains du président du CIO, Juan Antonio Samaranch.Au Mali, Henri Corenthin est également président de la fédération d’athlétisme du Mali où il a contribué à la création du Comité national olympique et sportif du Mali (Cnosm).

Malgré sa maladie, Henrin Corenthin se tenait informer de la situation sociale, politique et économique en Guadeloupe.

A 92 ans, Henri Corenthin aura mené une vie digne d'un chef d'Etat, dont l'aura dépassa les frontières de la Guadeloupe. Il a été inhumé jeudi 21 avril à Port-Louis en Guadeloupe.

Adieu,

Camarade, ta lutte ne sera pas vaine.

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